Raphaël Linari (Alpine A424_β) : « Une carrosserie très pure, à l’image d’une supercar de route »
Comment le design a-t-il été impliqué dans la conception de l’A424_β ?
C’est un projet auquel nous avons été progressivement intégrés. Nous avons commencé à travailler sur les premiers sketches en 2021 avant d’être mis en relation avec Oreca. Nous avons pu récupérer un de leurs châssis en fin d’année afin de disposer d’une base sur laquelle dessiner une Alpine.
Nous y avons passé une année entière, car nous avions besoin d’une phase d’apprentissage pour comprendre les contraintes en jeu, sur le plan des proportions et de l’attitude comme le poste de pilotage dicte la configuration de nombreux volumes associés. Nous avons alors réalisé une synthèse s’affinant ensuite au fil des tirs aérodynamiques. Ceux-ci ont rythmé le développement stylistique pour sculpter la forme de l’A424_β, au sens propre comme au figuré, comme nous devons entrer dans une fenêtre de performances imposée par la règlementation. C’était un travail de longue haleine, mais extrêmement enrichissant.
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Quels ont été vos principes directeurs dans la conception de ce design ?
Notre vision était d’avoir une carrosserie très pure, à l’image d’une supercar de route. Nous avons essayé d’être efficaces, donc nous avons simplifié, lissé et purifié les surfaces au maximum afin d’éviter une addition de volumes et d’éléments hétérogènes. Cela est particulièrement vrai sur l’arrière. C’est la fin du siège aérodynamique, là où la traînée doit être la plus fluide possible. Nous l’avons donc épurée au maximum pour nous émanciper de tout aspect cubique caractéristique des prototypes du Mans.

Que pouvez-vous nous dire de cette signature lumineuse ?
Ces signatures lumineuses sont peut-être les éléments les plus marquants. À l’avant, nous étions plutôt libres en dépit des obligations règlementaires sur la visibilité comme il s’agit en fait d’un module de projecteurs à intégrer dans un volume donné. En parallèle, l’arrière était beaucoup plus contraint. Nous avons créé une signature lumineuse propre à notre LMDh en réinterprétant le A fléché et en l’ajustant à son environnement dans la partie basse. Quand un concurrent nous suivra, la caméra embarquée ne pourra pas manquer ce A fléché. Cela envoie un message fort à l’avant et impactant à l’arrière.
Quels sont les liens avec Alpenglow ?
Les deux projets se sont mutuellement nourris d’une certaine manière. Alpenglow possède des codes de la LMDh pour un concept car roulant affranchi de toute contrainte, liée à la technique ou à l’homologation par exemple. Nous avons tiré notre inspiration des flancs d’Alpenglow tout en reprenant aussi certains travaux faits sur l’Alpine A110 pour l’A424_β.

L’exercice diffère-t-il vraiment de votre quotidien ?
Plus qu’un exercice différent, c’était inédit. Ces prototypes sont habituellement dessinés par des bureaux d’ingénieurs. De notre côté, nous n’avons pas forcément la même approche qu’un constructeur de véhicules de compétition. Pour la série, toutes les surfaces sont issues du design en synthétisant toutes les contraintes techniques de nos fournisseurs et usines. Contrairement à nos habitudes, l’ingénierie de course reprend la main pour la fabrication des moules et des pièces. Il s’agissait donc de dessiner une voiture qui ne se dessine pas d’habitude. Les contraintes liées à la performance sont toujours faciles à accepter, car nous faisons partie intégrante de la « band of racers » souhaitant voir Alpine atteindre les sommets. En parallèle, le modèle économique de la règlementation LMDh requiert une certaine rationalité budgétaire sur l’entretien et l’exploitation par une écurie privée. Là résidait toute la complexité, mais nous avons su créer un objet moderne, dans des proportions inédites pour une Alpine.
Comment avez-vous vécu cette aventure ?
Tout d’abord, c’est un honneur incroyable et un immense privilège de dessiner l’Alpine qui disputera les 24 Heures du Mans. Nous avons pris beaucoup de plaisir, malgré le « traditionnel » choc des cultures entre designers et ingénieurs. Face à l’émergence des contraintes, les designers vont chercher à lisser les surfaces pour les absorber alors qu’un ingénieur pourrait se contenter d’une bosse de dernière minute. Ce n’est qu’un exemple, mais il y a une approche d’harmonisation et de synthétisation des volumes. Nous avons tous réussi à travailler dans le même sens comme il aurait été peu pertinent de proposer des concepts à l’encontre de la performance, mais nous voulions que cette voiture soit la plus Alpine possible en dépit d’une base technique imposée. Nous avons su trouver ce juste équilibre avec cette Alpine iconique dont je suis immensément fier.
Commentaires (9)
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Michel Vaillant
3 aoû. 2023 • 11:46
À l'inverse de la plupart des autres concurrents qui ont plutôt privilégié les formes très anguleuses et biscornues.
ListerLMP900
3 aoû. 2023 • 12:09
Je préfère les optiques rondes de l'A110 aux traits de LED utilisés sur presque toutes les Hypercars
dmeyers
3 aoû. 2023 • 15:39
C'est une LMDh avec une face avant pas fondamentalement différente de la Cadillac, voir de l'Acura. Bon, il y a les feux arrières, mais à part ça ??
Si joint un lien vers une Alpine LMDh (autrement plus réussie l'évocation Alpine) : https://www.pinterest.fr/pin/291185932162485336/
Je sais, les goûts et les couleurs .... et puis finalement le principal c'est que mécaniquement/structurellement elle soit au top et le choix (au rabais ?) du moteur de F2 ne m'inspire pas confiance.
Cabrelbeuk
3 aoû. 2023 • 16:49
Skyd
3 aoû. 2023 • 17:49
C est vrai que l avant ressemble, un peu, à la Cad, mais l. arrière est magnifique.
L ensemble est équilibré et harmonieux !
Mais c est vrai aussi qu Alpine est ma marque de cœur..
La crainte, c est ce moteur Méchacrome. Le dernier réalisé pour l Endurance ne fut pas une vrai réussite.
@dmeyers c est pas un communiquant, c est un désigner, M. Linari.
Les commentateurs, ca ose tout, c est même à ça que ça se reconnaît !
Et c est aussi valable pour celui qui écrit ces lignes.
Bravo ? et merci Ei pour cette interview très originale !