Sim Racing

Arthur Rougier (partie 3) : « Certains ont fait 15 000 km en essais avant les 24H du Mans Virtuelles »

GT World Challenge Europe
26 oct. 2021 • 16:00
par
tbastin
Arthur Rougier est le champion de la Fanatec Esports GT Pro Series. Le Limougeaud est devenu un des meilleurs pilotes réels dans le monde virtuel. De quoi le rendre très convoité par les équipes de Sim Racing. Dans ce troisième épisode de l’entretien qu’il nous a accordé, il nous explique leur fonctionnement.

Arthur Rougier, pilote Emil Frey Racing en GT World Challenge Europe, est aussi un pilote qui dispute des courses virtuelles. Il est d'ailleurs le premier champion Fanatec Esports Pro Series. Le Français a accordé un long entretien à Endurance-Info sur le sim racing. Les deux premières parties sont à relire ici et .

 

Après votre titre en Fanatec Esports GT Pro Series, vous n’en avez pas encore fini avec le Sim Racing cette saison !

 

"Ah non, c’est clair. (Il rit, NDLR) Au moment où je vous parle, je prépare la deuxième course de la Virtual Le Mans Series que je dispute avec l’équipe R8G de Romain Grosjean. Je n’ai pas pu prendre part à la première épreuve, mais je serai au départ des 6 Heures de Spa (qui ont eu lieu le 16 octobre dernier, NDLR). Il y aura ensuite le Nürburgring, Sebring et la deuxième édition des 24 Heures du Mans Virtuelles, les 15 et 16 janvier. Nous sommes engagés en LMP2, catégorie où tout le monde dispose d’une Oreca."

 

C’est en quelque sorte avec les premières 24H du Mans Virtuelles que vous vous êtes fait remarquer en Sim Racing ?

 

"J’ai en effet disputé la course en 2020 avec l’équipe Rebellion Williams Esports et nous avons terminé 6e. Comme dans les vraies courses, les membres des équipes de Sim Racing analysent les performances des pilotes. Leur vitesse sur un tour, mais aussi la moyenne des relais. Et apparemment j’étais parmi les meilleurs pilotes réels… J’ai donc été convoité par plusieurs équipes de Sim Racing !"

 

Et vous avez choisi R8G…

 

"Oui, car ils ont un pôle de pilotes qui roulent sur Assetto Corsa Competizione. Or, ça m’intéressait tout particulièrement en vue de la Fanatec Esports GT Pro Series ! Non seulement je pouvais partager l’entrainement avec eux, mais aussi les réglages. Ce qui m’a fait gagner beaucoup de temps. Ceci dit, je n’étais pas le seul ! La plupart des équipes de GT World Challenge collaboraient avec des équipes de Sim Racing."

C’est quoi une équipe de Sim Racing ?

 

"Ce sont des gens qui jouent ensemble et qui essaient d’associer leurs forces. Ce sont des choses que l’on voit aussi dans le sport auto réel finalement. Sauf que cette fois on parle plus de moyens humains. Concrètement, on peut comparer les datas entre différents pilotes pour voir comment gagner du temps. On peut aussi partager les set-ups des voitures, ce qui est très utile."

 

Les réglages de la voiture en Sim Racing ont-ils autant d’importance qu’en vrai ?

 

"Je pense même qu’ils ont encore plus d’importance ! Ils demandent en tout cas beaucoup plus de travail. Comme le temps de roulage n’est pas limité, contrairement au réel, il y a moyen de tester énormément de choses et les Sim Racers professionnels passent des heures et des heures à peaufiner les réglages. C’est d’autant plus vrai que, il faut bien le dire, il y a parfois des choses illogiques. Après tout, un jeu vidéo – ou une simulation – ce n’est jamais que du code informatique. Ce n’est pas de la mécanique pure et dure. Parfois, il y a donc des réglages qui ne marcheraient pas en réalité, mais qui permettent d’aller plus vite dans le jeu. Par exemple, un jour nous avons testé la « map 2 » de la cartographie du moteur, qui permet normalement d’économiser du carburant tout en étant un peu moins performante. Or, dans ce cas, ça allait plus vite ! Tout ça pour dire qu’il faut vraiment tout essayer et que ça prend beaucoup de temps."

Est-ce vrai que certains pilotes sont payés dans les équipes de Sim Racing ?

 

"Oui, puisqu’il y a des primes mises en jeu et que, dès lors, il y a de l’enjeu. Dans certaines compétitions sur iRacing, le vainqueur remporte jusqu’à 100.000$. Ce n’est pas rien ! Dans le cas du championnat Le Mans Virtual, il y a 125.000$ à se partager pour les quatre premières courses puis 125.000$ rien que pour les 24 Heures du Mans Virtuelles. Donc, effectivement, il y a des pilotes payés."

 

Comment est l’ambiance dans une équipe de Sim Racing entre les pilotes réels et les Sim Racers ? Il n’y a pas de jalousie ?

 

"Moi je n’en ai jamais ressenti en tout cas. Au contraire ! J’ai été super bien accueilli. Vous savez, les Sim Racers sont, selon moi, tous des passionnés de sport automobile au départ. Ils sont très contents de pouvoir partager tout ça avec de vrais pilotes. Ils me demandent souvent comment c’est en vrai, quelles sont les différences. Il y a un vrai échange et c’est très sympa ! Les autres pilotes de R8G qui roulent sur Assetto Corsa Competizione m’ont encouragé pendant la saison de Fanatec Esports GT Pro Series. Il m’ont bien aidé pour les réglages et ils m’ont donné tous les trucs qu’ils pouvaient me donner. Ça a fait partie des clés de mon succès dans ce championnat."

 

Si on revient à la Le Mans Virtual Series, peut-on dire que les pilotes professionnels du monde réel ont en quelque sorte le statut des pilotes amateurs en Sim Racing.

 

"Oui, c’est tout à fait ça ! (Il rit, NDLR) Dans un championnat comme les Le Mans Virtual Series, il faut obligatoirement associer des Sim Racers et des pilotes réels, avec des temps de conduite minimum imposés. Or, comme les écarts sont très réduits entre les meilleurs Sim Racers, ce sont en effet les pilotes réels qui font le plus la différence. C’est exactement ce que l’on connait quand on a des compétitions Pro-Am où c’est souvent le Am, et donc le pilote classé Bronze par la FIA, qui peut le plus faire la différence."

Les Sim Racers sont-ils vraiment plus forts ?

 

"Ça dépend aussi de l’entrainement. Les Sim Racers professionnels font tellement de kilomètres… Honnêtement, je pense que, si on nous met avec une nouvelle voiture sur un nouveau circuit, je n’ai pas à rougir face à la plupart d’entre eux. Mais, par contre, eux font ensuite des milliers de kilomètres sur le circuit et avec la voiture et il parviennent à aller chercher quelques détails – spécifiques au Sim Racing – qui font les quelques dixièmes de seconde de différence par tour. Je vous donne un exemple : sur iRacing, sur le Circuit de Spa-Francorchamps, ils utilisent la bordure extérieure à l’entrée du Speaker’s Corner pour faire pivoter la voiture avant de descendre vers le Double Gauche. En réalité, ce n’est pas un vibreur que l’on ira chercher."

 

Vous vous entrainez beaucoup malgré tout ?

 

"Avant les 24 Heures du Mans Virtuelles, j’avais fait environ 3.000 km en entrainement et je trouvais que c’était déjà beaucoup. J’ai appris que les Sim Racers avaient fait parfois plus de 15.000 km sur le Circuit du Mans ! Si on compte plus ou moins 6 heures pour 1000 km, ça fait environ 90 heures d’entrainement. Moi, j’avoue honnêtement que, parfois, j’en ai marre. S’il fait beau, je préfère m’entrainer physiquement, notamment sur mon vélo. S’il pleut, faire du Simu me dérange beaucoup moins. (Il rit, NDLR) Même si j’aime faire les choses sérieusement, je veux que ça reste un amusement et, surtout, je donne toute la priorité à ma carrière dans le sport automobile réel."

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