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Stéphane Ortelli : "Quand tu côtoies la mort, tu vas au-delà de la douleur"

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Endurance Info
8 déc. 2020 • 14:00
par
lm@endurance-info.com

L'histoire veut que dix ans après sa violente sortie de piste à Monza, Stéphane Ortelli est victime d'un deuxième gros accident, cette fois aux Total 24 Heures de Spa 2018. Ce n'était pas le 27 du mois mais le 28. Cette fois encore, c'est un souci mécanique qui le fait sortir de la piste en pleine nuit dans le Raidillon. Sa Lexus RC F GT3 ne peut pas tourner et sa monture va s'encastrer à pleine vitesse dans la pile de pneus. S'en suit un début d'incendie et une grosse frayeur. La vidéo de la sortie est ici

Sortir à Spa dans le Raidillon ne pardonne pas. Là aussi, vous avez eu très peur ?

"Je tape et la voiture commence à brûler. Il fait nuit et il n'y a pas la moindre visibilité. La fumée commence à envahir l'habitacle. J'essaie de me dégager, de sortir, mais la porte ne s'ouvre pas. Pendant un instant, je me dis que c'est fini. Dès le choc, j'ai un léger moment où je ne sais pas ce qui m'arrive."

Vous avez paniqué ?

"J'attends que quelqu'un vienne me sortir, je réalise alors que je ne veux pas mourir. J'avais mal à un genou à cause de la colonne de direction qui était cassée. Je fais ce que je peux pour sortir à l'aide de mes jambes. La voiture s'embrase."

Et une fois à l'extérieur ?

"Je mets une main sur l'aileron et je m'effondre. Je n'ai plus de force. Rien... Cette fois encore, la sortie est consécutive d'une casse mécanique et pas une erreur de pilotage. Tu aimes ton métier car même blessé avec une casse mécanique, tu es déjà heureux d'être en vie et de pouvoir le raconter."

L'impact était tout de même très violent...

"On parle de 70G de face. Déjà 50G c'est beaucoup, mais à chaque 10G supplémentaires, tu perds 30% de chance de rester en vie. Cela occasionne des vertiges, le cerveau est touché. En 2008 et 2018, j'ai grillé deux jokers. Je me dis que je dois arrêter ma carrière avant 2028 (rire). J'ai connu trois carrières. La première s'est arrêtée au décès de Michele Alboreto au Lausitzring où j'étais présent car nous partagions la même auto. La deuxième a pris fin lors de l'accident de 2008. Les décès de Bob Wollek et Michele Alboreto m'ont dévasté."

On sent chez vous toujours cette envie de piloter à haut niveau...

"Bob Wollek m'a appris quelque chose : 'si les yeux vont et que tu as toujours envie, tu peux aller vite'. J'ai les yeux et l'envie. Le secret, c'est Bob. A 57 ans, on se demandait tous comment il faisait pour aller toujours aussi vite. J'ai roulé cette année en International GT Open sur une Ferrari 488 GT3. Cristiano Michelotto est venu me voir en me disant : 'Tu as 40 ans, pas 50, ce n'est pas possible'. J'ai toujours aimé transmettre et c'est encore plus le cas maintenant, toujours en allant vite. Je suis plus dur au mal après ces accidents. Quand tu côtoies la mort, tu vas au-delà de la douleur, tu la repousses plus loin..."

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