Les 24 Heures du Mans vues par... Philippe Besnehard

Au Mans tout est prétexte pour mieux voir, escabeau, tabouret, etc. Mais ce jour là, mieux voir s'est transformé en, comment dire... mieux être vu !!!

 

Les vérifications techniques se tenaient à l'époque place des Jacobins au Mans. Nous, un ami et moi, étions positionnés au niveau du secteur de la photo officielle des équipes, et donc face aux photographes professionnels. Afin de pouvoir pleinement apprécier ce moment, nous étions perchés sur des escabeaux. La foule toujours nombreuse en ces circonstances augmenta soudainement de volume à l'approche de l'écurie Nissan. Et quoi de plus normal qu'un Japonais soutenant une équipe japonaise. Aussi, un groupe de jeunes gens venus du pays de soleil levant tentait tant bien que mal de hisser deux banderoles à l'effigie de leur écurie préférée dans l'espoir que celles-ci figurent en bonne place sur la photo officielle. Mais c'était sans compter sur l'importante foule présente et aussi, je dois bien le dire, sur la petite taille de ces supporters venus de l'autre bout du monde... Pris soudain d'un élan de solidarité, j'agrippais une banderole et invitais mon pote a en faire de même afin de sauver l'honneur de ces fans courageux. Mission accomplie ! Les deux types au fond a droite de la photo, c'est nous !!! Le lendemain la photo était dans tous les points de vente du circuit...

 

Durant cette prise de vue, je me souvient d'avoir lancer a mon ami : "dis, tu crois que si je leur dit que je roule en Mazda, ils m'en voudront ?" Bon, une chose est sûr, c'est qu'ils ne comprenaient pas un mot de français, j'étais sauvé !!!

J'avoue parfois que ma patience a été mise à rude épreuve. C'est vrai quoi, au moment où tu vas prendre la photo, tu as toujours un gars qui vient se planter juste devant toi en plein milieu du cadre...

 

L'affiche est magnifique, Jaguar, Porsche, Toyota, Nissan, Mazda et Sauber Mercedes ! Les voitures le sont tout autant, particulièrement l'anglaise aux couleurs prune à parements jaunes d'un cigarettier. La configuration du paddock à l'époque permettait de voir les mécaniciens intervenir sur les voitures au pied du camion atelier, avant la course. Autour des voitures, les mécanos s'affairent. Doigt sur le déclencheur de mon appareil photos, j'attends que la vue se dégage. Les minutes s'écoulent et il faut savoir être patient. Je sais que je n'aurais que quelques secondes pour prendre cette photo tellement de personnes vont et viennent autour des autos. Il ne faut donc pas rater l'occasion sous peine d'attendre à nouveau de longs moments.

 

Et c'est là juste au moment où tu vas appuyer sur le déclencheur qu'un gars se pointe et campe en plein milieu de ton champ de vision... De dos, aucun moyen d'agir car il ne me voit pas. Un premier geste a un gars de l'équipe qui passe pour lui demander de "virer" ce type, mais la réponse est négative. Un second me laisse entendre que cela n'est pas possible. Bon c'est qui ce gars que personne ne veut bouger ? Après tout il n'y a que lui qui me gêne, alors je me lance dans un "please" appuyé. C'est lorsqu'il s'est retourné vers moi que j'ai compris que c'était le big boss de Jaguar, monsieur Tom Walkinshaw ! Du coup je comprenais mieux l'attitude des mécaniciens. Aussi mon second "please", accompagné de mon plus beau sourire fut... comment dire... moins catégorique pour faire bouger ce gars, euh pardon, monsieur Walkinshaw qui finit par consentir a se déplacer de... quelques pas !

J'ai bien conscience que j'aurais pu déclencher un incident diplomatique avec nos amis anglais.

Pour beaucoup d'entre nous le Mans se vit aussi dans les campings. Voici deux anecdotes.

Les Allemands auraient ils de la suite dans les idées. Vous connaissez sans doute la tradition qui consiste a empiler des bouteilles de bière pour former une pyramide. C'est très à la mode durant la semaine du Mans. A chacun son architecture pyramidale... Mon pote et moi passions tous les jours devant la tente de camping d'un spectateur allemand. Chaque jour celui ci nous saluait, se fendant d'un grand bonjour a note encontre. Mais il faut bien dire qu'il n'avait pas l'air très doué pour la construction de sa pyramide. Chaque jour, les canettes empilées s'écroulaient davantage, ce qui provoquait chez nous un sourire un peu moqueur... Chaque jour nous le sentions un peu plus désabusé... Mais, de retour dans le camping le dimanche après la course, quelle surprise ! Notre ami allemand nous attendait fier comme pas deux. Il se tenait debout, mains dans le dos, au côté de son mur de canettes, impeccable ! Nous nous sommes arrêté pouce levé, comme pour le féliciter. C'est à cet instant qu'il sortit les mains de derrière son dos tenant un... pistolet à colle !!!

 

Mais les Anglais sont pas mal non plus ! Je me souviens d'une année pluvieuse durant laquelle nous avons essuyé de violents orages. Les campings s'innondent assez vite, c'est la galère, mais ça fait parti "du jeu". Le vendredi soir veille de course mais aussi soirée festive dans les campings, des spectateurs anglais n'avaient rien trouvés de mieux que de sortir une piscine gonflable sous l'orage ! En maillot de bain ils avaient l'air, comment dire... heureux ! Quelle rigolade le lendemain matin, en allant à la douche, lorsque nous decouvrions dans la piscine que nos princes d'Angleterre s'étaient transformés en... grenouilles !!!