WEC / Qatar - Le management des pneumatiques, la clé du succès pour Porsche en 2024
On ne connaît pas encore le résultat des 1812 km du Qatar mais on sait déjà que Porsche ne pourra pas rééditer le triplé de 2024 avec Jota en plus des deux officielles à Losail puisque les deux 963 sont uniquement complétées par celle de Proton Competition. Avant le lancement de la saison 2024, le constructeur allemand s’était rendu au Qatar pour deux journées d’essais en novembre 2023.
« A ce moment-là, nous sommes repartis avec encore plus de soucis qu’avant, se souvient Romain Gineste, responsable de l’ingénierie sur le programme Porsche Motorsport WEC. Nous avons connu du graining durant les deux jours, les surfaces des pneus étaient très endommagées à certains endroits. J’étais assis dans l’avion du retour et je me suis dit que c’était probablement le test le plus inutile de tous les temps. Mais ensuite, nous avons réfléchi ensemble et cherché une solution. »
Le phénomène de graining se produit lorsque les pneus sont surchargés. Des parties de la bande de roulement s’agglomèrent, créant ainsi de fines ondulations dans le sens du roulage. Elles réduisent la surface de contact et influencent la température de la surface du pneu. Lors des essais bouclés sur le circuit de Losail, connu pour son adhérence très élevée, de profondes rainures s'étaient formées.

« Une fois que le graining a débuté, il est difficile de s’en débarrasser et le train de pneus concerné est détruit, poursuit l’ingénieur français. Bien sûr, on ne gagne pas de cette façon. Par conséquent, vous n’avez aucune chance de terminer le programme souhaité durant les essais. En course, le relais serait pratiquement terminé et des temps au tour rapides et réguliers ne seraient pas possibles. »
Dans le camp Porsche Penske Motorsport, on a planché le sujet après ces essais qualifiés d'inutiles. Une configuration modifiée de la cinématique de suspension et un rodage minutieux des nouveaux trains de pneus ont permis d’éviter ce fameux graining.
« Grâce à cela, nous avions une longueur d’avance sur tous les autres dès le départ, car nos concurrents n’ont acquis leur expérience en matière de graining que juste avant le week-end de course », souligne Romain Gineste. Porsche Penske Motorsport et l’équipe cliente Jota avaient profité du Prologue pour nettoyer soigneusement tous les trains de pneus en vue de l’ouverture de la saison. « Quelle que soit la température de la piste, cela a permis d’avoir des tours rapides et réguliers durant la course et d’augmenter la durabilité des pneus, explique-t-il. Théoriquement, nous aurions même pu faire trois relais avec un seul train de pneus. Jota l’a d'ailleurs fait à l’époque. »

Ce qui était vrai l’année passée ne l’est plus vraiment cette année, comme le confirme Romain Gineste : « Les concurrents ont maintenant beaucoup plus d’expérience de la course de l’année dernière. De plus, de nombreuses équipes ont effectué des essais à Doha en décembre et janvier, et sont donc bien mieux préparées. De plus, durant le Prologue, les pneus ne pouvaient plus être rodés en vue de la course. »
En 2024, les équipes pouvaient disposer du quota de pneus du week-end de course dès le Prologue, ce qui n’est plus possible cette année. Les pneus pour la course ne pourront être utilisés qu’à partir de la qualification.
Est-ce le nouveau timing de la course a une influence ? Le départ sera donné à 14 heures et non plus à 11 heures comme en 2024. Les pilotes vont donc rouler jusqu’à minuit. « Cela a un impact significatif, rapporte Gineste. L'année dernière, les températures ambiantes et de l'asphalte ont augmenté pendant deux heures après le départ avant de chuter d'environ 15°C à la fin de la course. Cette année, nous avons déjà dépassé le pic des températures au départ et nous allons courir dans l'obscurité beaucoup plus longtemps. Nous nous attendons donc à des conditions plus constantes. »

La baisse des températures peut réserver des surprises à tout moment, en particulier dans les cinq premières heures de course jusqu'à 19 heures, car les pneus avant et arrière réagissent différemment à certaines phases de la baisse de température. Cela a un effet sur l'équilibre du véhicule. Au cours de la même période, on observe également l'augmentation de l'humidité au Qatar, qui modifie la densité de l'air et réduit ainsi la force d'appui aérodynamique des voitures de course.
« Comme nous ne pouvons pas réagir à ces phénomènes pendant la course en ajustant les réglages, c'est au pilote de s'adapter aux conditions changeantes et de maximiser les performances, même s'il y a un risque de sous-virage accru, explique Gineste. Les ingénieurs doivent anticiper les conditions de la piste dans les dernières heures de course et régler la Porsche 963 pour qu'elle soit particulièrement compétitive dans les derniers relais, lorsque les décisions sur la victoire et les positions sont prises, sans faire trop de compromis dans la première phase de la course. »
Le graining, c'est quoi ? Le « graining » est un phénomène d’usure anormale en fonction de l’utilisation du pneu. Dans certains cas des petits morceaux de gomme peuvent se détacher de la surface du pneu et s’y recollent sous forme de granules, rendant la bande de roulement irrégulière et dégradant les performances.
Commentaires (8)
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lmercier
26 fév. 2025 • 18:43
David Giraud
26 fév. 2025 • 18:55
Enfin, comme d'habitude, il faut de bons pilotes pour bien conduire !
250LM
27 fév. 2025 • 11:07