Premiers essais pour l'Alpine A424 – 1/3 : Une première sortie encourageante
Le projet est en gestation depuis des mois. Et tant à Viry-Châtillon qu'à Bourges, on piaffait d'impatience à l'idée de voir enfin rouler sur la piste cette fameuse A424, présentée en juin dernier, en marge de l'édition du centenaire des 24 Heures du Mans. Pour qu'elle soit aussi rapide que belle, il va falloir être fort. Car si certains critiquent son air de famille avec la Acura ARX-06 avec laquelle elle partage le châssis Oreca, bon nombre s'accordent à dire que l'Hypercar frappée du A fléché est de fort belle facture, même dans sa livrée brute de carbone.
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Essais Alpine A424 – 3/3 : Philippe Sinault : « Ce projet nous fait changer de dimension »
Après un premier démarrage moteur le 5 juillet, la A424 a procédé à un petit déverminage début août sur le circuit école du Paul-Ricard à très basse vitesse, sans tous les éléments de carrosserie, avec pour unique but de vérifier les fonctions basiques. C'est donc lundi dernier 21 août que la LMDh française a roulé - complète - pour la première fois, sur l'aérodrome du Castellet. « Nous avons vérifié tout ce qui était lié à la sécurité comme le système de freinage, la direction etc, a confié ce matin Bruno Famin, directeur de Alpine Motorsports. Mardi, nous avons roulé toute la journée sur le tracé de 5,8 km. Mercredi nous avons eu la piste de 17h à 19h et enfin, jeudi, nous l'avons eue pour la journée complète. »
Une piste partagée avec Lamborghini Iron Lynx, Rebellion Racing et Ferrari F1 Clienti. C'est Nicolas Lapierre qui a eu l'honneur d'étrenner l'auto en premier. « De par son expérience et son bagage technique, c'était logique » souligne Bruno Famin. Un premier tour que toutes les personnes présentes ne sont pas prêtes d'oublier. « Forcément, ce fut un moment empreint d'émotions, reconnaît Philippe Sinault, Team Principal du Alpine Endurance Team, appellation derrière laquelle se cache son équipe Signatech. Les regards, les sourires observés à ce moment là, ça fait un peu office de baromètre pour la journée qui va suivre et même un peu pour le projet. Alors oui, nous avons pris le temps de savourer ces premiers tours de roues mais, très vite, nous sommes ramenés à la réalité et rattrapés par l'opérationnel. Alors quand nous avons vu Nico sortir avec la banane, ça nous a aidé à imaginer la suite et à nous mettre dans la bonne dynamique. »
Nico, c'est le pilote maison. Il défend les couleurs de Signatech depuis 2016, sans parler de son passage chez Signature en F3 de 2002 à 2004. Alors forcément, son avis compte énormément pour Philippe Sinault. « Il nous a, en premier lieu, parlé du caractère bienveillant de la voiture, nous a confié ce dernier. Il nous a dit être bien installé, avoir un bon feeling et que l'auto était assez réactive et prédictive. Autant d'éléments primordiaux car ce sont eux qui permettent à nos pilotes d'être en confiance. »
Ont succédé à Nico au volant Matthieu Vaxiviere le mercredi et le jeudi, journée durant laquelle il a cédé le baquet une paire d'heures à Charles Milesi. « En tout, plus 1000 km ont été bouclés, se réjouit Bruno Famin. Ce qui n'est pas mal du tout pour une première séance. Nous y sommes allés étape par étape, crescendo, mais la dernière journée, hier, a été solide, avec un grand nombre de kilomètres avalés et notamment un relais de plus trente tours (35. Ndlr). »
Et tout cela sans souci majeur ? « Nous en avons rencontrés, bien évidemment, enchaîne celui qui officiait en tant que directeur technique sur le programme Peugeot 908. Et de nature plus ou moins importante. Nous avons notamment dû composer avec une température sous capot élevée. Et puis il y a aussi toute la mise au point des freins avec le brake by wire, et tout un tas de choses comme ça... Mais globalement, ça s'est bien passé et les retours des pilotes ont été plutôt bons. »
Des soucis assurément exacerbés par les conditions caniculaires qui frappent actuellement une grande partie du pays. Ont été relevés ces trois derniers jours jusqu'à 37°C dans l'air et 55°C sur la piste, rien que ça. Même à Bahreïn les équipes ne font pas face à des valeurs aussi élevées. « Nous avons dû composer avec des conditions assez extrêmes qui ont fait ressortir assez rapidement certaines limites, reconnaît Philippe Sinault. Ce fut difficile pour tout le monde : mécaniciens, pilotes, voiture... Mais peut-être était-ce ce que nous pouvions espérer de mieux. Cependant, tout cela a été plutôt bien géré. »
L'un des autres points positifs, c'est la cohabitation entre toutes les entités impliquées et qui rendent ce projet intéressant. Pour rappel, Signatech s'occupe de tout ce qui est purement opérationnel et de la partie exploitation châssis. La chaîne de traction dont le V6 3,4 l monoturbo est supervisée par Alpine Racing alors qu'Oreca était également présent pour vérifier que tout se passait bien et pour intervenir si nécessaire, l'entreprise varoise ayant été grandement impliquée dans la conception de la A424. C'est à elle que l'on doit notamment son châssis.
« Et ça, c'est l'un des grands motifs de satisfaction, enchaîne Philippe Sinault. La façon dont nous avons tous travaillé ensemble m'a beaucoup plu et l'esprit qui anime ce projet me conforte dans l'idée que nous avons les bons partenaires et tout ce qu'il faut pour faire quelque chose de bien. » Un ressenti partagé par Bruno Famin, qui n'a pu assister aux essais puisqu'à Zandvoort, pour le Grand Prix des Pays-Bas : « Les équipes s'entendent bien et ont bien travaillé ensemble, a-t-il renchéri. Je pense que les fondations sont bonnes pour attaquer un vrai bon programme d'essai. »
Encourageant, tel est le mot qualifiant le mieux la première sortie sur circuit de la A424. « J'ai le sourire et je l'avais aussi hier soir en quittant le circuit, a reconnu Philippe Sinault. Mais nous avons encore du pain sur la planche. » Selon nos informations, l'Hypercar tricolore aurait été flashée à 334 km/h et aurait bouclé le plus rapide de ses 185 tours en 1'41''7 ! Mais hors de question de s'emballer pour autant, ce n'est pas le genre de la maison. « Ce fut une étape importante du projet, tempère Bruno Famin. Mais nous sommes loin d'avoir fait l'équivalent ne serait-ce que d'une course de six heures. Donc veillons à ne pas tirer de conclusions hâtives. Nous avons parcouru pas mal de kilomètres mais hors de question de s'enthousiasmer de trop. Nous avons eu des soucis, certains pas si anodins que cela et nous allons en rencontrer d'autres. Donc en premier lieu, nous allons mettre l'accent sur la fiabilité. »
Là sera le but premier de la prochaine séance, prévue durant la deuxième moitié du mois de septembre, à MotorLand-Aragon (Espagne). « D'ici là, nous avons de quoi nous occuper, rigole Philippe Sinault. Il va nous falloir analyser la grande masse de datas que nous avons emmagasinée. Ça va être un axe fondateur pour la suite. Et des sessions sur simulateur sont également prévues. »
Avec les trois pilotes cités précédemment, mais aussi le Brésilien André Négrão, régulièrement mis à contribution. C'est parmi ce groupe de quatre que se trouvent les heureux élus qui seront réquisitionnés en Espagne. « La vraie vertu de ce premier roulage était de savoir où est ce que nous en étions, a conclu Philippe Sinault. Il nous fallait commencer, c'est maintenant chose faite. »
Commencer et rendre concret plusieurs mois de travail acharné abattu dans l'ombre. Il reste maintenant un peu plus de six mois à Signatech et à Alpine Racing pour faire en sorte que la "belle bleue" pour le moment noire attire vers elle tous les projecteurs le 2 mars prochain, au Qatar, pour ses débuts en compétition.
Commentaires (6)
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OlivierP
26 aoû. 2023 • 8:38
On croise les doigts pour eux.