Chronique d'un monde qui change, part 6
Cette sixième chronique d’un monde qui change débute ce matin vers 7h30 bien loin des débuts d’Endurance-Info en mai 2006. Pourtant, les deux ont un lien étroit. Il y a 17 ans, notre quotidien était le nez sur l’écran d’ordinateur à débusquer l’info tous les soirs. En ce 30 décembre 2023, de bon matin, l’écran est toujours là, mon compère des débuts Antho aussi. Cette fois, il s’agit d’une sortie Zwift à pédaler chacun chez soi sur le même parcours. Croyez-moi, en 2006, ni lui ni moi n’avions l’envie de faire du vélo. Une passion commune est née en dehors des courses d’endurance. Son coup de patte à 12 bornes de l’arrivée dans une cote à 10% m’a bien fait mal. Le poids des ans pour ma part mais on a laminé un Coréen qui voulait se faire la malle après quelques kilomètres.
Des kilomètres, il y en a eu pas mal depuis mai 2006 pour Endurance-Info. Cette année-là marquait les débuts de la catégorie GT3. On ne pouvait pas passer à côté et allez savoir pourquoi, mais Julie s’était mise en tête d’écrire les articles GT3. Je pense qu’elle a dû écrire un demi-article. Décriée à ses débuts, la catégorie GT3 était clairement raillée sur le forum Endurance-Info car oui nous avions un forum qui avait un certain succès. Sans les forums, nous n’aurions jamais rien fait. C’est là que se faisaient les rencontres virtuelles bien loin des réseaux sociaux actuels où tout le monde déblatère sur tout le monde, le plus souvent sans rien connaître. En plus de l’écriture des articles, il fallait aussi modérer le forum.
Dès le lancement du site, Laurent et Antho ne voulaient pas déroger à la règle du ‘on ne publie pas n’importe quoi’. Il fallait vérifier les infos. Je l’ai déjà dit mais les deux ont une éthique irréprochable. Endurance-Info n’a jamais cherché le buzz. Chaque matin, on regardait les chiffres de fréquentation du site et c'était encore timide. Petit à petit, les autres médias dédiés à l’Endurance disparaissaient les uns après les autres. Dailysportscar et Endurance-Info étaient les deux sites majeurs. Notre bébé ne demandait qu’à grandir, tout cela toujours sans un seul euro.
Laurent, c’était la technique qui l’intéressait. Pour ma part, rien à carrer de savoir si le gurney était plus haut de 2mm. Lui kiffait les articles techniques assez longs mais très intéressants à lire. Claude, c’était le king des courses historiques, du Super GT, du Grand Am et du VdeV. Sans quitter Le Mans, Claude avait accès à tout le monde par téléphone ou par mail. Chaque fin d’année, nous diffusions les cartes reçues par les uns et les autres. Je pense que tout le paddock Grand-Am lui souhaitait les vœux, y compris les grandes équipes. C’est par lui que j’avais eu le numéro de Patrick Dempsey. Julie, c’était la photo et pas le GT3. Antho, c’était le touche-à-tout, le gars capable d’écrire sur n’importe quoi en un temps record. Personne n’avait la moindre carte de presse mais une envie de développer le média. L’arrivée d’Endurance-Info était finalement bien perçue par le paddock.
Pour ma part, il fallait toujours mixer travail professionnel et Endurance-Info avec d’un côté l’écriture, de l’autre les déplacements. Je peux dire que j’étais à Silverstone pour la toute première course FIA GT3 de l’histoire. Je vais être honnête, personne ne donnait cher de cette série sachant qu’à côté on avait un FIA GT très fort. Moi, j’ai kiffé dès le début avec les équipes qui engageaient chacune trois autos. Jean-Luc Beaubelique était déjà chez Jérôme Policand sur une Porsche, Fred Mako sur une Dodge Viper engagée par Racing Logistic. C’est aussi à Silverstone cette année-là que j’ai réalisé ma première interview en solo avec Stéphane Ratel. Un sacré souvenir car c’était (et c’est toujours) le boss du GT. J’ai rarement été impressionné par des personnes à interviewer mais cette fois-là, il fallait faire bonne impression. Je vais peut-être en étonner plus d’un mais je ne prépare jamais de questions. Je sais par quoi je vais commencer, j’ai une petite trame en tête, mais je laisse place à la discussion pour rebondir quand je l’estime judicieux. De plus, j’enregistre très peu, je prends des notes.
Une fois encore, mon année se passe entre FIA GT et Le Mans Series. On se tape même un voyage avec David Fontayne en voiture au Mugello (FIA GT) pour aller dans la foulée à Jarama (LMS). Je me souviens d'ailleurs du Mugello où j’étais en interview avec Manu Collard. Un certain Jean-Marc Teissedre arrive dans le game et nous flingue les sites Internet. Merde, bâché par la personne qui pour moi était (et reste) une légende vivante. Il n’y avait aucune animosité dans ses propos mais en 2006, on sentait bien la différence entre la presse papier et le 2.0. Les temps ont bien changé. Avec Internet, l’info se propage en temps réel et il n’était plus utile d’attendre une semaine pour lire un compte-rendu de course. Il est vrai que je suis mal placé pour dire cela, moi qui reste un fervent défenseur du papier.
En 2006, je me fais une bonne dizaine de déplacements. Souvenez-vous de l’histoire avortée du DTM dans les rues d’Avignon. En octobre, c’est Le Mans que va visiter le DTM. C’est l’époque de Tom Kristensen, Vanina Ickx et Jean Alesi. Une conférence de presse est organisée au Mans en amont du meeting où Claude et moi sommes conviés. Pour faire original, un petit déjeuner est improvisé au café situé au pied de la cathédrale du Mans en présence de Tom K et Vanina. Pour cette journée, mon père est avec moi, juste en accompagnant par pure passion. Direction ensuite le circuit pour la conférence de presse. Il est même possible de faire un baptême de piste dans une caisse DTM, une Audi A4 ou un TT. Nous sommes un tout petit groupe et Claude s’y colle pour monter dans le TT. Chacun s’équipe d’une combinaison Audi Sport, ce qui je vous l’accorde, en jette. Je relaie Claude dans le baquet de droite du TT et nous voilà en piste dans une caisse démoniaque avec un freinage tout aussi démoniaque.
Une fois changé, je cherche mon père. Introuvable. Je demande alors à Claude qui me dit qu’il est parti avec Tom K. La bonne blague. Et là quelques minutes plus tard, je vois l’Audi A4 DTM du nonuple vainqueur des 24H du Mans s’arrêter devant le stand. Qui en descend ? Mon père. Je lui lance : « Mais comment t’es arrivé là ? » « Bah quelqu’un est venu me voir pour savoir si je voulais faire un tour. J’ai dit oui. Au bout du premier tour, il m’a fait un signe, j’ai rien compris, alors j’ai levé le pouce. » On avait le droit à un tour lancé. Cette fois, allez savoir pourquoi, c’est le seul qui a fait plusieurs tours en Audi A4 DTM avec Tom K, alors qu’il était venu au Mans en simple passionné. C’est aussi pour vivre des moments comme celui-ci que l’on fait tout ça. Mon père m'a transmis la passion de l'Endurance, alors ce n'était qu'un bien maigre retour.
Une autre anecdote de 2006. Nous avons toujours cherché à ratisser assez large au niveau des interviews. Je me dis que je vais contacter François Fillon pour lui demander de parler de sa passion du sport auto et des 24H du Mans. Mes collègues me rient au nez en me faisant comprendre qu’il ne fallait pas s’attendre à la moindre réponse. Je trouve le mail de son cabinet sur Internet, j’envoie quelques questions et le soir-même j’avais les réponses. Je prépare l’article pour une publication le lendemain. La journée correspond par hasard avec l’annonce de la candidature à l’élection présidentielle de Nicolas Sarkozy qui avait pour conseiller politique François Fillon. Les moteurs de recherche avaient certainement rôdé la chose et le nombre de clics sur cet article était incroyablement élevé.
L'année 2006, c'était encore celle de l'insouciance pour nous. Il n'y a jamais eu la moindre obligation de faire telle ou telle chose car chacun savait ce qu'il avait à faire. Il y avait la liberté d'expression, un ton employé, sans jamais dénigrer qui que ce soit. Laurent et Antho étaient clairs sur le sujet. Ce qui était vrai en 2006 l'est toujours en 2023. J'y reviendrai certainement plus tard mais je retrouve actuellement avec mes deux compères Pierre et Thibaut la même amitié où chacun est là quand il le faut avec des centaines de messages envoyés quotidiennement entre nous. Il n'y a pas un mec qui dirige, il y a juste des gars qui veulent faire avancer les choses. Depuis 2006, les envies de tout arrêter ont été rares même si le milieu est parfois assez dur envers nous. On savait aussi prendre du temps sur les circuits. Demandez donc à Antho pourquoi il ne boit plus (tout comme moi d'ailleurs) un verre de manzana depuis une soirée à Barcelone.
Des anecdotes, je pourrais vous en raconter des centaines et même des trucs pas très racontables. L'année 2023 se termine, tout comme ces chroniques. Pourtant, il y aurait encore tant de choses à dire. En près de 18 ans d'Endurance-Info, le monde a changé. L'un de mes meilleurs moments de la saison 2023 était au Nürburgring en GTWC Europe. J'aime le côté humain et les trucs imprévus. Là c'était improbable. Untel a gagné devant untel, ça a ses limites surtout si on y rajoute une histoire de BoP que les acteurs n'ont pas le droit de commenter. Une règle débile au possible selon moi.
Rendez-vous demain pour the last one. On y parlera d'un monde qui change et de quelques histoires qui me seront revenues en tête en faisant une séance de Zwift...
Commentaires (13)
Connectez-vous pour commenter l'article
xavierpompidoudeveloppement@gmail.com
30 déc. 2023 • 18:49
All the best pour une grande année 2024 à toute l'équipe et à ses lecteurs ! 🍾🥂🎉🙏🏻
lmercier
30 déc. 2023 • 18:52
filou
30 déc. 2023 • 19:07
WD
30 déc. 2023 • 19:14
gerardallan8
30 déc. 2023 • 20:06
le monde change mais Endurance Info
reste à ce jour bien en avance 😇 le peloton est bien loin derrière dorénavant