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Philippe Gache : "Je suis arrivé au Mans sans réelle préparation"

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14 nov. 2018 • 14:00
par
David Bristol
Philippe Gache est bien connu des passionnés de sport automobile et d'endurance, en particulier. Le pilote originaire d'Avignon, comme Jean Alesi, a disputé dix fois les 24 Heures du Mans et a toujours adoré cette course. L'homme de 56 ans pilote toujours et a gardé son bon "coup de volant" comme il le démontre souvent dans les courses historiques. Retour avec lui sur ses années Le Mans !Vous êtes venu aux 24 Heures du Mans pour la première fois en 1987 (WM P87 avec Dominique Delestre et Roger Dorchy). Quels souvenirs en gardez-vous ?« J’avoue que j’étais un peu terrorisé car je faisais de la Formule 3 à l’époque. Je suis arrivé au Mans sans réelle préparation en faisant juste quelques des tours lors des Pré-Qualifs. L’équipe avait eu des petits soucis techniques avec la voiture et je ne l’ai découverte qu’en toute fin de séance, sous la pluie. Je me souviens surtout qu’elle était très puissante ! »
Vous avez disputé deux participations sous les couleurs WM. Quel était votre regard sur cette équipe de passionnés ?« J’ai fait les 24 Heures du Mans en 1987 et 1989 (avec Pascal Pessiot et Jean-Daniel Raulet) car, en 1988, j’étais sponsorisé par un cigarettier en F3 et je n’avais pas eu l’autorisation de faire Le Mans. Je voyais cette écurie avec l’œil d’un jeune débutant. J’étais émerveillé par tout cet environnement et la voiture était intéressante à piloter. J’étais juste impressionné, tout simplement ! »
Vous ouvrez ensuite une page Viper, d’abord en 1994 (Dodge Viper RT 10 #41 avec Denis Morin et François Migault) puis chez Oreca (Viper GTS-R #50 avec Eric Hélary et Olivier Beretta en 1996 et #61 avec Dominique Dupuy et Olivier Beretta en 1997). Cela reste des moments importants pour vous ?« Tout à fait ! De manière générale, mes dix participations aux 24 Heures du Mans restent de bons souvenirs. J’adore cette course, mais elle ne me l’a jamais rendue, je ne lui en veux pas (rire). J’ai systématiquement eu des soucis électriques ou des voitures connaissant des sorties de piste. Certes, j’ai fait 10 fois Le Mans, mais je n’ai pas de palmarès, surtout des abandons. Pourtant, j’ai souvent eu des autos compétitives comme cette Viper gérée par ORECA, elle était imbattable. Cependant, j’ai toujours eu le chat noir comme lors de mes deux courses avec cette auto ! »
Il y a eu ensuite un gros changement avec des voitures engagées sous votre propre bannière…« Ce fut une vraie nouvelle page pour moi car, à partir de là, nous avons commencé à engager nous-mêmes nos propres autos sous les couleurs de SMG, une jeune équipe débutante. Ce fut une expérience très forte car c’était quelque chose de bien plus complexe pour moi : je devais continuer à piloter tout en gérant l’équipe. Ce fut de très bons souvenirs, mais là encore avec peu de réussite ! »La première auto que vous engagez sous le nom de SMG est une Riley-Scott. Comment se sont fait les contacts avec le constructeur américain ?« Lors de ma dernière participation avec ORECA en 1997, j’avais déjà dans l’idée de créer ma propre structure. De plus, mes fidèles partenaires, Speedy et Mobil (le S et le M de SMG, ndlr) étaient prêts à me suivre. Mon souci, c’est que je suis quelqu’un de gourmand, et je voulais engager un prototype. J’ai alors découvert cette Riley Scott que j'ai trouvé certes simple mais efficace, ça correspondait bien à l’équipe que nous voulions être. Nous nous sommes donc rapprochés d’eux ! »
Comment était cette auto à piloter ?« Elle était géniale ! Simple, compétitive, mais nous avons eu des soucis moteur car elle n’était pas habituée à rouler 24 heures. Le Mans, c’est difficile et la préparation moteur n’était pas très bien adaptée. »
La première année, en 1998, vous avez roulé avec un champion du monde Moto (500 cm3), Wayne Gardner. Comment était-il ?« Effectivement et le 3e pilote était aussi un ancien pilote moto, Didier de Radigues. Il était très professionnel et bon pilote. Par contre, humainement, il était un peu dur, mais cela reste une bonne expérience. »Après le chapitre Riley Scott s’en est ouvert un dernier avec la Courage C60…«En 2000, nous nous sommes rapprochés d’Yves Courage. J’ai découvert le potentiel de cette auto, équipée d’un Judd, aux Pré-Qualif où j’ai réalisé le 5e temps. Nous avons été surpris par cette voiture performante et bien née. En qualif', je refais le 5e temps et, au départ, ce fut compliqué car je n’avais pas de tableau de bord, donc zéro info. Nous avons quand même décidé de partir comme ça, en faisant le premier relais. Après l’avoir changé, nous avons fait une belle course, la voiture était impeccable, très bien équilibrée et marchait fort. A 10 heures du matin, nous étions encore 4e derrière les trois Audi officielles. Pour nous, l’exploit était au bout et cela aurait changé l’avenir de SMG. Malheureusement, nous avons éclaté un pneu en ligne droite qui a trop abîmé l'auto et avons dû abandonner. Ce fut le point d’orgue pour nous au Mans. Cette 4e place est revenue à Henri Pescarolo et son équipe, je pense que ça a changé la vie de son écurie, ça aurait pu être la même chose pour nous ! »
Le Judd était-il un bon moteur ?« Il était fabuleux, même s’il a causé notre abandon l’édition suivante, en 2001. C'était un moteur de Formule 1 qui hurlait, c’était grisant de piloter cette voiture."
Quel est votre meilleur souvenir du Mans?"Je crois que c'est justement l'édition 2000, même si, peut-être, c'est celle qui me laisse le plus de regrets. Avec cette Courage C60, on avait fait une très belle semaine, des Pré Qualifs jusqu’à notre abandon. »La WM, la Viper, la Riley, la Courage… Quelle a été l’auto la plus sympa à piloter ?« Elles étaient toutes différentes, mais la plus amusante, je dirais la Riley Scott qui, une voiture à l’ancienne que l’on pouvait brutaliser. La plus performante a été le C60, une auto incroyable, 360 km/h dans la ligne droite et avec les chicanes ! »
Vous avez roulé dans beaucoup de disciplines dans votre carrière. Quelle place occupe les 24 Heures du Mans ?« J’ai fait les 500 Miles d’Indianapolis également (en 1992, ndlr), ce sont des courses comparables. C’est le top, un monument et de les avoir faites 10 fois, c’est juste incroyable. J’adorais la semaine du Mans avec cette tension qui monte au fur et à mesure. Malheureusement, avec SMG, je me suis mis trop de pression sur mes épaules. Cela m’a parfois empêché d’en profiter plus. »SMG, c’est quoi maintenant ?« Nous sommes plus un constructeur qu’un préparateur maintenant. Nous avons trois activités dans l’entreprise. Nous fabriquons les Toyota officielles qui font le Dakar. Les deux autos engagées sont montées chez nous depuis maintenant cinq ans. Nous construisons également des voitures de rallye raid, des Buggys SMG qui font aussi le Dakar. J’ai vendu la licence en Chine, elles sont donc fabriquées là-bas maintenant, mais nous continuons à faire du soutien et du bureau d’études pour eux. Pour finir, nous avons développé une activité historique. Pour ma part, je continue à rouler en classique et si je pouvais, je ne ferais que ça (avec une belle réussite puisque Philippe Gache a remporté l’une des deux courses de l’Historic Tour au Mans sur une Lola T294/6 - Ford BDG, ndlr) ! »
Merci à Laurent Chauveau, Christian Vignon, Michel Faust et Claude Foubert pour les photos

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