Le Mans 66, une course, un film : l'Exposition est ouverte au Musée des 24 Heures
Divers
24 oct. 2019 • 16:09
par
Claude Foubert
L'Automobile Club de l'Ouest avait invité hier les media au Musée des 24 Heures - Circuit de la Sarthe pour l'inauguratn de l'Exposition consacrée au film de James Mangold « Le Mans 66 » dont la sortie en salle est programmée le mercredi 13 novembre prochain.Fabrice Bourrigaud, Directeur du Patrimoine de l'ACO, était le maître de cérémonie de cette soirée et en quelque sorte son conférencier, apportant un éclairage tout particulier, ayant collaboré de près à la réalisation du film, l'ACO ayant fourni à la FOX, Productrice du film, au réalisateur, de nombreuses archives et, bien entendu, sa connaissance pleine de l'épreuve sarthoise.Fabrice Bourigaud, dans son propos introductif, rappela que c'était après »Le Mans », le second film entièrement basé sur les 24 Heures du Mans. « Le Mans, ce n'est pas du cinéma, mais Le Mans fait son cinéma », a-t-il dit.
L'accès à l'Exposition se faisait sous le regard de Henry Ford II et de Enzo Ferrari, les deux hommes à l'origine de ce formidable duel Ford vs Ferrari de l'édition 1966.
Des documents d'époque mettent le visiteur dans l'ambiance de cette édition 1966 : la feuille des essais officiels (avec la pole pour Dan Gurney et la Ford #3, vainqueur en 1967) en 3.30.6, Gurney réalisant également le meilleur tour en course avec le même chrono de 3.30.6) , le classement de la course avec ses 15 voitures classées (sur les 55 partants), le carnet de Pesage de la Ford #2 et d'autres.
Cette édition est restée fameuse entre autres, en dehors de la première victoire de Ford au Mans et donc de la défaite de Ferrari, par l'arrivée la lus serrée de l'histoire des 24 Heures, 20 mètres séparant la Ford GT40 MkII #2 de la #1.Fabrice Bourrigaud a précisé l'histoire de cette arrivée. Au cours de la dernièère heure de course, la Ford #1, avec Ken Miles au volant, possédait plus de 30 secondes d'avance sur la voiture sœur, la Ford #2 aux mains de Bruce McLaren. C'est durant cette dernière heure que Ford adopta la « stratégie de l'ex aequo », souhaitant que les deux voitures passent sur la même ligne à l'arrivée. Ken Miles reçut la consigne de tourner en quatre minutes au tour, ce qu'il respecta scrupuleusement, alors que McLaren, qui n'était soumis à aucune contrainte, tournait plus rapidement et revint donc facilement sur la GT40 #1.
Les deux voitures arrivèrent donc côté à côte à l'arrivée. On sait ce qu'il advint du résultat. La Ford #2, étant partie plus loin sur la grille de départ, avait donc parcouru plus de teraain que la #1 et, selon la réglementation, Bruce McLaren et Chris Amon furent donc déclarés vainqueurs pour 20 mètres... La « stratégie de l'ex aequo » avait fait long feu et pourtant, Ford ne pouvait ignorer la réglementation, l'ACO lui en ayant envoyé six exemplaires.
Arrivée côte à côte ? Pas tout à fait...Si, dans la dernière ligne droite, les deux Ford sont bien bord à bord (ci-dessus), ce n'est pas tout à fait le cas sur la ligne d'arrivée (ci-dessous), la longueur d'une voiture séparant la Ford #2 de la Ford #1, à l'avantage de la voiture de McLaren et Amon.
Que s'est-il passé dans les derniers mètres de cette arrivée ? Ken Miles, agacé par cette consigne de l'ex aequo, a-t-il sciemment levé le pied, ou bien Bruce McLaren, qui n'avait pas caché qu'il ne laisserait pas la victoire lui échapper, a-t-il appuyé un peu plus sur l'accélérateur ? On ne le saura jamais...
Fabrice Bourrigaud a précisé aussi qu'il aurait été pratiquement impossible pour les pilotes d'arriver exactement sur la même ligne, en raison de la position de conduite dans une Ford GT40 très basse -40 pouces, soit un mètre-, de la pluie qui tombait lors de l'arrivée, deux conditions qui gênaient fortement la visibilité des pilotes et qui, conjuguées, à la toute petite largeur de la ligne matérialisant l'arrivée, rendaient cet ex aequo souhaité par Ford quasi impossible !
Peu de voitures au cœur même de l'Exposition – deux Ford GT40 et une CD Peugeot, cette dernière ayant participé à cette course de 1966, pilotée par Pierre Lelong et Alain Bertaut qui après sa carrière de pilote devint un journaliste automobile de haut rang, créa la Coupe R8 Gordini et fut Vice-Président de l'ACO où il fut pendant une vingtaine d'année le responsable des Règlements Techniques des 24 Heures-.
La Ford GT40 bleue -châssis 10146, au centre en l'Exposition , évoque les essais sur l'aérodynamique commandés par Carroll Shelby.
La seconde GT40, dans le fond de la salle, est un véritable écran et change constamment d'aspects.
Ken Miles et Carroll Shelby sont mis en scène dans les authentiques costumes du film Le Mans 66, alors que de grands panneaux évoquent le pilote et le constructeur, Christian Bale et Matt Damon, -qui jouent leurs rôles dans le film-, le réalisateur James Mangold, le Chef Décorateur, le Français François Audouy, le tout au milieu d'éléments de décors du film, dont une réplique de la fameuse horloge Dutray...
Dans le couloir menant à la salle de cinéma, on peut voir plusieurs photos de tournage du film.
Après la visite, la parole a été donnée à Pierre Fillon, le Président de l'ACO, et aux trois invités de marque : Peter Miles -le fils de Ken, qui n'était pas revenu au Mans depuis 1965, Henri Pescarolo qui a disputé ses premières 24 Heures du Mans cette année 1966 avec une Matra BRM, associé à Jean-Pierre Jaussaud, et le Dr Wolfgang Ulrich.
Peter Miles n'était pas au Mans en 1966 et a précisé que lorsque son père est rentré aux USA après ces 24 Heures, il n'avait pratiquement pas parlé de la course. Peter Miles n'en a en fait connu l'histoire que plus tard.
Peter Miles a été invité à faire des tours du circuit Bugatti avec un pilote de luxe, puisque c'est Henri Pescarolo qui était au volant de la Ford GT40, Peter Miles se disant impressionné par la vitesse de passage en courbe.Henri Pescarolo a évoqué la course de 1966 : « J'étais un pilote de F3 débutant et il n'était pas du tout prévu que je courre au Mans. On m'a appelé dans les tout derniers moments pour faire équipe avec Jean-Pierre Jaussaud sur la Matra BRM M620. Je n'avais jamais piloté la voiture et je n'avais jamais tourné sur le circuit du Mans ! Pendant les essais, que Jean-Pierre Jaussaud, avaient commencés, la Matra a connu beaucoup de problèmes et je n'ai donc pris le volant de la voiture que de nuit. En plus, c'était le moment où les Ford et les Ferrari se battaient pour la pole position. Je les voyais me dépasser avec 70 kilomètres de mieux que ma Matra. C'était impressionnant, et c'est la seule fois de ma vie où j'ai eu peur dans une voiture ! Petit à petit, je me suis quand même mis à faire mon travail sur la Matra, mais ces Ford et ces Ferrari, c'était vraiment impressionnant. En course, j'étais concentré sur ma voiture et donc le duel Ford-Ferrari, je ne l'ai pas vraiment suivi. Pour ma part, le cœur allait à Ferrari dont j'étais fana, mais j'ai vraiment été impressionné par la manière dont Ford a relevé le défi Ferrari et a remporté la course. »Le Dr Ulrich, questionné sur la stratégie de Ford, a indiqué qu'il n'avait jamais favorisé une voiture en particulier. Toutes les voitures étaient à un niveau identique et la priorité allait ensuite à celle qui se révélait la plus performante pendant la course. Celle-ci est un travail d'équipe, qui englobe les pilotes, les ingénieurs, les mécaniciens. Pour sa part, il a insisté sur le fait qu'il n'aimait pas du tout demander à des pilotes de changer de rythme. Lorsque ça a pu se produire, c'était une volonté du constructeur ou du marketing, pour rapprocher les voitures, mais cela n'a jamais été une décision de son fait.
Fabrice Bourrigaud a également donné quelques détails sur le tournage : les stands de 1966 ont été reconstruis à l'identique en Californie, dans un aéroport privé, 34 voitures (Ferrari, CD , Porsche 906...) ayant participé aux 24 Heures 1966 ont été reconstruites, Ford a acheté et démonté 30 Ford Falcon pour reconstituer un atelier d'époque ...L'Exposition est ouverte au Musée des 24 Heures jusqu'au 23 février 2020.D'autres photos ici
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