24H Spa

2000, La dernière édition des 24H de Spa-Francorchamps en mode Tourisme

28 juin. 2024 • 8:00
par
Fabrice Bergenhuizen

Dédiées depuis 1964 aux voitures de tourisme, les 24h de Spa ont connu leur apogée au cœur des années 80. Véritable figure de proue de la compétition européenne et même mondiale en 1987, le double tour d’horloge spadois a, tour à tour, attiré des constructeurs aussi prestigieux que Alfa, BMW, Ford, Jaguar, Rover, Volvo, Mercedes, VW, Nissan ou encore Toyota.

 

Ceux-ci ne lésinaient d’ailleurs pas sur les moyens pour tenter de décrocher la victoire tantôt au général tantôt dans leurs classes respectives. Trois catégories étant répertoriées : les moins de 1.600cc, les 1.600 à 2.500cc et les plus de 2.500cc.

De fait les écuries de pointe n’hésitaient pas à enrôler des pilotes de tout premier ordre, venant, qui plus est, d’horizons aussi divers que l’endurance, la F1, le rallye ou même la moto. C’est ainsi qu’au gré des éditions, le public, à chaque fois présent en masse, eut le loisir d’apprécier le coup de volant des illustres Tom Walkinshaw, Win Percy, Gordon Spice, Martin Brundle, Peter Brock, Hans Heyer, Klaus Ludwig, Hans-Joachim Stuck, Bernd Schneider, Marc Surer, Dieter Quester, Gerhard Berger, Roberto Ravaglia, Emmanuele Pirro, Mauro Baldi, Gianfranco Brancatelli, Johnny Cecotto, Jacques Laffite, Jean-Pierre Jarier, Jean-Louis Schlesser, Alain Cudini, Dany Snobeck, Eric van de poele, Thierry Boutsen, Jean-Michel Martin, Pierre Dieudonné ou encore Marc Duez, pour ne citez qu’eux.

 

En dépit de la qualité du spectacle proposé et de l’engouement suscité par ce type de compétition, la FIA décidait, fin 1988, de manière saugrenue, de supprimer purement et simplement le championnat d’Europe des voitures de tourisme. Au grand dam des très nombreux aficionados de la discipline.

 

Dès lors les 24h de Spa devenaient une épreuve open mêlant des bolides de type  Gr.A et N FIA avant que les G.O de la classique ardennaise ne décident, milieu des années 90, de privilégier les voitures correspondant à la nouvelle réglementation édictée par la fédération internationale, à savoir les « supertourisme ».

Véritables bêtes de course à la sonorité envoûtante, en dépit d’une cylindrée limitée à 2 litres, les « supertourisme » avaient tout pour plaire au public. Las, conçues à la base pour des sprints de 30 minutes, elles se montraient très fragiles et surtout très coûteuses à mettre en configuration 24h. Si bien que, hormis BMW, aucun constructeur ne s’impliqua officiellement.

 

Loin de se décourager, les chevilles ouvrières de Race se remettaient à nouveau en question et ouvraient, dès 1998, leur épreuve aux nouvelles « superproduction », nettement moins sophistiquées et de fait moins onéreuses. Cependant si le plateau gagnait en quantité et en variété, force est de constater que les nouvelles «reines » de la planète tourisme ne sont jamais parvenues à enthousiasmer la foule. Sous-motorisées et  peu glamour, elles ne faisaient, de surcroît, pas partie d’un championnat porteur.

 

Tant et si bien que, la mort dans l’âme, Jean-François Chaumont et Josse K.Dekens se voyaient contraint de faire table rase du passé et opter pour la voie du GT à compter de 2001.

 

Paradoxalement l’édition 2000 des 24h, dernière de l’ère tourisme, attira un très large éventail de pilotes de haut vol.

 

Ainsi, le Peugeot Team Belgique Luxembourg, tenant du titre, alignait la bagatelle de trois 306 GTI pour autant d’équipages de choc, en l’occurrence Kurt Mollekens- Fred Bouvy- Didier Defourny, Vincent Radermecker – Jeffrey Van Hooydonk- Eric van de Poele, et Vanina Ickx- Anthony Beltoise – Thierry van Dalen !

 

Disposant de moyens nettement moins colossaux, le MG Racing était également de la fête avec deux Peugeot 306 GTI dévolues à des trios pour le moins improbables. Bas Leinders, Jean-Michel Delporte et…Henri Pescarolo se partageant le volant de la première tandis que la seconde était destinée à Marc Rostan, Pierre Petit et Jean-Bernard Bouvet.

 

De son côté, Renault Belgium mettait une Clio RS à la disposition de Pierre-Yves Corthals, de Serge Jordan et du célébrissime Jean Ragnotti.

Pour leur donner la réplique, BMW Belgium engageait, via la structure de Gabriele Rafanelli, deux 320i confiées, d’une part, aux stars locales Marc Duez et Vincent Vosse, flanquées du redoutable Patrick Huisman, et, d’autre part, au rallyman Grégoire de Mévius, avec le concours des fougueux David Saelens et Thomas Winkelhock.

 

Le coup le plus fumant était toutefois l’œuvre de la formation ELR. Cette dernière, alignant dans le championnat de Belgique une Honda Accord pour Philippe Tollenaire, s’assurait pour les 24h, le soutien précieux du Barwell Motorsport ainsi que le renfort de deux pilotes de tout premier plan, en la personne de Gabriele Tarquini et Tom Kristensen. Excusez du peu !

 

Une deuxième monture étant alignée pour les Britanniques David Leslie, James Kaye et Mark Lemmer.

 

Toujours dans le clan Honda, les Integra faisaient office de sérieux outsiders avec notamment les structures BPR emmenée par les Hollandais volants Peter Kox et Cor Euser et PSI Motorsport dont les fers de lance n’étaient autres que Stéphane De Groodt, Eric Bachelart et Markus Palttala.

Déjà très lié à Nissan, le RJN Motorsport alignait, pour sa part, une Primera pour un solide trio composé de Stéphane Lémeret, Chris Buncombe et Tommy Rustad.

Quant au pavillon Opel, il était défendu par le Mühlner Motorsport, lequel alignait deux Astra OPC pour notamment Marco Werner, Benoît Galand et Eric Nève et le Kissling Motorsport avec, en tant que capitaine de route, Stefan…Kissling.

 

Enfin, les couleurs d’Alfa Romeo étaient principalement représentées par le LO Racing, la structure d’Olivié Lainé alignant deux 156 pour quelques fines gâchettes,  tels  Sébastien Ugeux, Geoofroy Horion, Larry Cols et Sylvain Noel.

 

Plus puissantes du fait de leur cylindrée supérieure mais, à contrario, bien plus proches de la série, beaucoup plus lourdes et dépourvues de vérins pneumatiques (interdits par le règlement), les BMW M3 Gr.N étaient toutefois présentes en masse. Parmi elles, les deux exemplaires du Duller Motorsport, superbes dans leur livrée Route 66, faisaient figure d’épouvantails d’autant qu’ils étaient confiés aux bons soins des quadruples vainqueurs de l’épreuve Jean-Michel Martin et Thierry Tassin ainsi qu’aux jeunes loups Anthony Kumpen et Jérôme Thiry.

Quant au Taverna Racing, présent lui aussi avec deux M3, il faisait confiance à rien moins que Beppe Gabbiani, Alex Caffi et Andrea Chiesa.

 

Si Patrick Huisman offrait la pole position à la BMW 320 n°4 d Team Rafanelli, précédant de justesse la Honda Integra de Stéphane De Groodt et l’Alfa Romeo 156 de Sébatien Ugeux, la bonne surprise nous venait de Marc Schoonbroodt. Engagé de dernière minute, en compagnie de Tom Zurstrassen et Eric van de Vyver, sur la BMW M3 de réserve du Duller Motorsport, le Liégeois réalisait un somptueux 8e chrono, le 1er  en Gr.N.

 

Encore plus fort, auteur d’un départ canon, le pilote de la BMW M3 frappée du n°26 s’emparait du commandement après 7 minutes de course !

 

Las, quelques instants plus tard, Schoonbroodt se faisait éperonner à la chicane par un Gabriele Tarquini un peu trop impétueux ! Cardan cassé, c’en était déjà fini des espoirs de la Honda que l’Italien partageait avec Tom Kristensen.

 

La BMW Duller, bien que touchée au niveau du moyeu, pouvait en revanche poursuivre sa route après une longue réparation.

 

Guère plus de réussite pour la seconde Honda Accord/Barwell Motorsport de David Leslie, contrainte à l’abandon (moteur cassé) au bout d’à peine plus de 3h de course. Même sort pour la BMW 320/Team Rafanelli de Thomas Winkelhock dont la mécanique prenait un sérieux  coup de chaud à l’issue d’un contact avec la Peugeot d’Anthony Beltoise.

 

Autre abandon de marque, celui de la Honda Integra/PSI de De Groodt-Bachelart-Palttala, berceau moteur touché suite à une sortie du Finlandais.

 

Si bien qu’à l’issue du premier quart de l’épreuve, la Peugeot 306 GTI de Mollekens-Bouvy-Defourny menait la danse, précédant d’un tour la BMW M3/Duller de Martin-Tassin-Moreau et de deux tours la seconde Peugeot de Van Hooydonck-Radermecker-Van de Poele et la BMW 320 de Vosse-Duez-Huisman, ralentie par le remplacement d’une courroie d’alternateur.

 

La Renault Clio RS de Corthals-Jordan-Ragnotti occupait une brillante 5e position tandis que la Peugeot 306 GTI de Leinders-Delporte-Pescarolo, après avoir brièvement occupé la tête, pointait au 7e rang.

Plus pour très longtemps ! Une litanie d’ennuis (embrayage, disque de freins, joint de culasse,…) la faisait chuter dans les profondeurs du classement. Quant à la Clio de Ragnotti and co, ce sont des problèmes de cardan qui entravaient sa progression.

 

Si la Peugeot de  Ickx-Beltoise-Van Dalen était ralentie par des soucis électriques, en revanche les voitures sœurs de Mollekens-Bouvy-Defourny et Van Hooydonck-Radermecker-Van de Poele tournaient comme des horloges, monopolisant les deux premières places, séparées de deux tours, au cap de la mi-course.

 

La BMW M3 Duller, 3e, se tenait en embuscade à 3 tours tandis que la 320 de Vosse, retardée par un câble d’accélérateur cassé, figurait au 4e rang à déjà 5 tours des meneurs.

 

Dimanche en fin de matinée, les évènements se précipitaient. Ainsi sur le coup de 11h15, la Peugeot de Van de Poele devait jeter l’éponge (boîte de vitesse bloquée), imitée, peu de temps après, par la BMW rescapée du Team Rafanelli, en proie à d’insolubles ratés moteur.

 

A une heure de l’arrivée, nouveau coup de théâtre ! La Peugeot de tête se voyait privée de l’usage d’un cylindre ! Après de nombreux arrêts au stand, Didier Defourny reprenait la piste avec un moteur à l’agonie, son avance ayant fondu comme neige au soleil. Désormais aux commandes de la BMW M3/Route 66 n°25, Jean-Michel Martin tentait le tout pour le tout mais échouait finalement à 1’55 de la Peugeot ! D’autant plus rageant qu’un écrou de roue récalcitrant lui avait perdre de précieuses secondes un peu plus tôt dans la journée et que le moteur de la lionne rendait son dernier soupir à peine la ligne d’arrivée franchie !

 

Dans le clan Peugeot on explosait de joie ! Une joie rendue encore plus intense par le podium décroché par Vanina Ickx, Anthony Beltoise et Thierry van Dalen, lesquels précédaient la Honda Integra de Kox-Euser-Ploeg.

 

Classés 74èmes après une heure de course  suite au contact viril de Tarquini, Marc Schoonbroodt, Tom Zurstrassen et Eric van de Vyver  ont effectué une remontée de tous les diables pour croiser le damier au 5e rang, le 2e en Gr.N, devançant la VW Bora TDI de Hemroulle-Verbergt-Duchateau, lauréate en diesel.

Si l’Opel Astra de Galand-Nève-Wyss décrochait une méritoire 7e place, en revanche, la Renault  Clio de Corthals-Jordan-Ragnotti et la Peugeot 306 de Leinders-Delporte-Pescarolo, vu leurs avatars, devaient se contenter de lointaines 15e et 20e places.

 

Parmi les « people » ayant pris part à cette édition fertile en rebondissements, Alexandre Debanne, présent sur une BMW M3 en compagnie de Willy Maljean, se classait 18e tandis que le tennisman Henri Leconte ne voyait pas l’arrivée. Sa Renault Clio, affûtée par l’écurie de Jacky Delvaux, ayant été victime d’une rupture de suspension au petit matin.

 

Une nouvelle page se tournait dans la riche histoire de 24h de Spa, les GT prenant le relais afin d’assurer un maximum de show. Si le coup fut difficile à accepter par les inconditionnels des voitures de tourisme, force est de constater que l’option choisie par les organisateurs fut la bonne. 

 

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