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WEC - 1000 miles de Sebring J-9 : La Ferrari 499P peut-elle frapper d'entrée ?

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8 mar. 2023 • 16:00
par
Thibaut Villemant
La très attendue 499P a beaucoup roulé ces derniers mois. Suffisant pour jouer la gagne en Floride ?
© Ferrari

Voiture : 499P (LMH) - V6 3.0 biturbo

Directeur Ferrari Attività Sportive GT : Antonello Coletta

Directeur AF Corse : Amato Ferrari

Directeur Technique GT et Voitures de Sport : Ferdinando Cannizzo

Team manager : Battistino Pregliasco

Pilotes #50 : Antonio Fuoco / Nicklas Nielsen / Miguel Molina

Pilotes #51 : James Calado / Antonio Giovinazzi / Alessandro Pier Guidi

Coordinateur technique : Luca Massè

Ingénieur #50 : Damien Augier

Ingénieur #51 : Justin Taylor

Où en est la 499P ?

Tout comme Toyota, Peugeot, Glickenhaus ou Vanwall, Ferrari a opté pour le règlement LMH, désireux d'avoir la main sur tous les composants de son Hypercar. Une auto dévoilée le 29 octobre 2022 à Imola, dans le cadre des Ferrari Finali Mondiali. « Comme tous les prototypes de la marque, elle reprend la lettre P, qui signifie Prototype, avait expliqué Antonello Coletta. Quant au chiffre 499, il correspond à la cylindrée unitaire du moteur. » En l'occurence un V6 biturbo de 3.0 litres de cylindrée. Dès sa présentation, l'italienne a fait mouche. Mais si ses voitures ont toujours été esthétiquement réussies, « il Commendatore » ne les jugeait que par leurs résultats en course, et de ce côté là, le mystère demeure...

 

➡️ Vidéo - Le développement de la Ferrari 499P

 

« Depuis son shakedown du 6 juillet 2022 (à Fiorano. Ndlr) aux derniers essais effectués, la 499P a parcouru plus de 24 000 kilomètres, souligne Giuliano Salvi, responsable des programmes courses et essais au sein du département Ferrari GT & Sports Race Cars. Du simulateur à la piste, nous avons utilisé une nouvelle méthodologie de travail pour obtenir une Hypercar rapide et fiable ». 24 000 kilomètres avalés sur divers circuits européens (Fiorano, Imola, Mugello, Vallelunga, Paul-Ricard, MotorLand Aragon et Portimão) mais aussi américains, à l'instar du Sebring International Raceway (Floride) sur laquelle la belle italienne va effectuer ses débuts en compétition la semaine prochaine.

 

« En Hypercar, après l'homologation, les essais sur piste sont limités, poursuit Salvi. Nous avons donc essayé d'utiliser toutes les opportunités pour intégrer efficacement tous les systèmes et améliorer le niveau de fiabilité des composants de la voiture. » Avant cela, Ferrari avait même maximisé ses essais en faisant rouler sur un grand nombre de sessions deux autos en même temps, ce que peu de constructeurs se permettent. Et le tout en mettant à contribution pas moins de 30 ingénieurs.

© Ferrari

Fiable et rapide, il semblerait justement que la 499P le soit. « L'équipe a travaillé jour et nuit, sans relâche, pour essayer de faire en sorte que l'auto soit roulable en course et fiable, reconnaît James Calado. Mais nous ne le saurons pas vraiment tant que nous n'aurons pas pris part à une course. Nous ne pouvons prédire ce qu'il va se passer mais nous sommes impatients de relever le défi, d'apprendre, en espérant que cela se concrétise par des résultats. » Si elle a dû faire face à quelques contretemps et des soucis de jeunesse inhérents à toute nouvelle création lors de ses séances d'essais, rien d'excessivement alarmant, d'autant que les ingénieurs en seraient rapidement venus à bout.

La formation Ferrari / AF Corse est-elle à la hauteur ?

Certains se sont posés la question... nous jamais ! Pourquoi ? Très rapidement, à savoir le 7 juin 2021, Ferrari a confirmé continuer à s'appuyer sur AF Corse pour tout ce qui concerne l'exploitation course, cette entité qui a tant contribué à tous ses succès en GT, en GTE comme en GT3.

 

Dans une catégorie GTE Pro ô combien relevée, la formation de Amato Ferrari a donné à maintes reprises des leçons de stratégie à la concurrence malgré un côté petit commando de façade. Sa science de la course a de nombreuses fois fait merveille, à tel point qu'en 12 ans de GTE Pro (2011-2022), Ferrari est de loin le constructeur le plus prolifique de la catégorie, avec notamment cinq victoires aux 24 Heures du Mans (2011, 2012, 2014, 2019 et 2021) contre trois à Porsche (2013, 2018 et 2022), deux à Aston Martin (2017 et 2020) et une à Ford (2016) et Corvette (2015). En championnat, (ILMC et WEC confondus), la firme au cheval cabré se taille également la part du lion avec 36 succès contre 20 à Porsche, 19 à Aston Martin, six à Ford, deux à BMW et un à Corvette. Enfin, Ferrari totalise sept titres de champion du monde Constructeurs GTE, Porsche deux et Aston Martin un. On ne change pas une association qui gagne. « Les gars, regardez ce que vous avez réussi à faire ces dernières années, a d'ailleurs lancé à juste titre il y a quelques mois à ses troupes Ferdinando Cannizzo. Pourquoi ne réussirions-nous pas à faire en Hypercar ce que nous avons fait en GT ? » Et pour cause...

© Ferrari

Pour tenir le cerceau, là aussi, contrairement ce qui est avancé par certains, c'est du lourd. Loin d'être ridicule en F1 et lors de ses diverses apparitions en Endurance, Antonio Giovinazzi rejoint cinq autres pilotes pour qui la discipline n'a aucun secret... au contraire de la catégorie. Comme l'avançait à juste titre James Calado il y a quelques jours : « Le hic, c'est le trafic. C'est rare que nous soyons sur un circuit avec des GT. Jusque là, dans nos GT, nous nous plaignions toujours des prototypes. C'est quelque chose auquel il faudra s'habituer. »

 

James Calado et Alessandro Pier Guidi sont des « racers » purs. Quant aux jeunes Antonio Fuoco et Nicklas Nielsen, ils n'en finissent plus de surprendre et seraient très à l'aise au volant de leur nouvelle arme. Miguel Molina, team player hors pair, a lui eu les faveurs de son employeur par rapport à Alessio Rovera, et gageons qu'Antonello Coletta & Co avaient des raisons de lui donner sa chance. Qu'on se le dise, le trio de la n°50 est solide, très solide !

 

Enfin, sur le muret, les deux ingénieurs de piste chapeautés par Luca Massè font aussi partie du gratin. On ne présente plus Justin Taylor qui, après s'être fait connaître chez Audi, a brillé notamment chez Rebellion Racing, JDC-Miller Motorsports et même en IndyCar où il a suivi Sébastien Bourdais. Quant à Damien Augier, il a fait la joie de Dams en GP3 / F2 après être passé par R-Ace GP ou encore ART GP. L'an passé, il a fait ses armes en Endurance sur l'Oreca n°83 alignée par AF Corse pour François Perrodo / Nicklas Nielsen / Alessio Rovera.

Antonio Giovinazzi © Ferrari

Sebring, un terrain de jeu hostile pour l'italienne ?

Quand nous lui avions posé la question en novembre dernier, Antonello Coletta nous avait répondu : « Sebring n'est assurément pas le circuit le plus facile pour débuter en compétition. Mais c'est la même chose pour tout le monde. À nous de faire en sorte d'être en mesure de lutter avec nos concurrents avec dignité, et même d'être en position de jouer la gagne. Pour répondre à votre question, nous avons ça en tête, mais serons-nous en mesure de le faire ? Je n'en suis pas sûr. »

 

Ferrari aborde le défi Hypercar avec beaucoup d'humilité, mais non sans ambition. Pouvait-il en être autrement pour une marque qui a été initialement créée dans l'unique but de faire de la compétition. Mais surtout, la marque transalpine a bien préparé son coup, bien décidé à réussir son entrée. Deux sessions d'essai ont ainsi été organisées sur le Sebring International Raceway, ce tracé si spécifique et si dur pour la mécanique. Et si James Calado insiste sur le fait que « le but premier sera d'apprendre aussi vite que possible et d'améliorer la voiture » mais tout de même « avec l'espoir de bien faire », Sebring ne fait pas peur à Ferrari, qui pourra s'appuyer sur de nombreuses données, quand Toyota n'y a pas encore fait rouler sa GR010 Hybrid 2023 et que la Peugeot 9X8 n'y a tout simplement jamais posé les roues.

 

Par ailleurs, si toute comparaison serait fortuite et que la catégorie Hypercar est de toutes façons régie par une BoP, les chronos enregistrés en essais à Sebring seraient très encourageants. Il n'en faut pas plus pour pousser certains spécialistes à faire de la 499P – au même titre que la Cadillac – la principale rivale de l'épouvantail Toyota GR010 Hybrid sur cette manche d'ouverture. La piste le confirmera-t-elle ?

© Ferrari

La pression sera-t-elle compliquée à gérer ?

Quand on s'appelle Porsche et Ferrari, deux marques à vocation sportive, tout échec est inacceptable. Plus encore pour la marque au cheval cabré, qui revient dans la catégorie reine de l'Endurance après un demi-siècle d'absence. « L'Endurance c'est important pour les tifosi, mais aussi pour nos clients, reconnaît Coletta. Leur fidélisation via l'Endurance, c'est aussi ce qui a fait notre histoire. Nous revenons dans la catégorie-reine après 50 ans d'absence et tous nous ont remerciés. Nous avons une grosse responsabilité. »

 

Pour James Calado : « Etre un pilote Ferrari est légèrement différent. Il y a beaucoup de pression parce que vous savez qu'historiquement, la marque a toujours été obsédée par la gagne. Donc c'est de la pression mais c'est normal et nous allons y aller avec l'approche la plus détendue possible et l'ambition de faire de notre mieux. »

 

Car oui, le 17 mars prochain, tous les regards seront braqués sur la Ferrari 499P et le WEC pourrait enregistrer les meilleurs audiences de son histoire en dehors des 24 Heures du Mans. On dit le plus grand bien de cette auto, de cette équipe, et on attend beaucoup de cette marque qui ne laisse insensible aucun amateur d'automobile.

 

Mais il va falloir se montrer à la hauteur. L'échec ne sera pas toléré. Elément clé des victoires de la marque en GT depuis 2016 et partie prenante de l'épopée victorieuse de Michael Schumacher en F1 avec le cheval cabré, Ferdinando Cannizzo connaît trop bien le métier pour occulter cela. « Nous sommes conscients d'être les acteurs d'un chapitre passionnant de l'histoire de Ferrari, avoue-t-il. À nous de faire en sorte qu'il soit beau. » Et ce dès ses premières lignes, qui seront écrites à Sebring.

© Ferrari

Commentaires (6)

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Auri24

8 mar. 2023 • 17:05

Bel article de présentation très complet, bravo et merci ?

On souhaite évidemment que l’histoire soit belle pour Ferrari, comme pour les autres concurrents.

Vivement les qualifs de Sebring pour avoir une vrai hiérarchie !

LittleBen

8 mar. 2023 • 18:04

Excellent article!
Sur papier, Ferrari semble s’être très bien préparé, malgré qu’ils se soient lancés plus tard dans l’aventure.
Deux choses me rassurent, en tout cas:
1) Le marketing et la communication Ferrari fonctionnent beaucoup autour du sujet. Leur engagement est donc sérieux. Ils reconnaissent d’ailleurs que leurs clients attendent les débuts de la 499P avec impatience.
2) Fred Vasseur est responsable de la Scuderia en F1 et pas du programme Hypercar. C’est une très bonne chose de séparer les deux, ce qui ne se faisait pas à l’époque de Forghieri. Cela permettra d’éviter qu’un éventuel échec dans une des deux disciplines ne soit trop vite imputé à l’autre discipline …

CYRP

8 mar. 2023 • 18:44

L'IMSA va bien finir par fournir la liste des engagés ...

Cabrelbeuk

8 mar. 2023 • 19:10

Rappelons nous que Porsche était très préparé mais à eu moulte souçi technique lors de sa première course.

Prudence donc.

tvillemant

8 mar. 2023 • 20:00

Porsche a eu énormément de soucis en essai. De ce que nous avons entendu, ce n'est pas le cas de Ferrari.