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Alain Ferté : "Le coup de fil de Jean Rondeau reste mon meilleur souvenir !"

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26 déc. 2018 • 12:00
par
David Bristol

Alain Ferté a été un grand habitué du circuit des 24 Heures du Mans entre 1983 et 2012. Il a notamment été pilote d’usine pour Jaguar, Peugeot et Mercedes avec une 8e place comme meilleur résultat en 1989, mais il a aussi été en passe de remporter la classique mancelle en 1991. Avec son frère Michel qui compte exactement le même nombre d’éditions à son actif, les deux garçons ont été des fidèles de cette course. Originaires de Falaise, dans le Calvados, ils ont bien entendu été bercés par la course sarthoise, mais pas seulement. « Quand mes parents m’ont emmené aux 24 Heures du Mans pour la première fois, je devais avoir 5 ou 6 ans. J'allais au Mans aussi pour voir d'autres courses avec mes potes quand j'étais plus grand. Je me suis aussi rendu sur le circuit de Rouen Les Essarts, j’ai vu des mecs comme Jim Clark, Jochen Rindt, venir faire de la F2 alors que j’étais tout môme. A l’époque, ils étaient en F1, mais disputaient aussi des courses en F2. L'année où Jo Schlesser se tue, j'y étais.»

 

En 1983, il dispute ses toutes premières 24 Heures du Mans avec une Rondeau M482 en compagnie de son frère Michel et de Jean Rondeau lui-même, expérience qu’il qualifie de « moment exceptionnel, c'était un rêve de gosse qui se réalisait ! Le coup de téléphone de Jean Rondeau pour disputer cette course reste certainement le meilleur moment de ma carrière ! » Les trois hommes avait alors abandonné après 13 heures de course sur un souci moteur, mais le principal n’est pas là. Le jeune Alain, alors âgé de 27 ans, a mis le doigt dans l’engrenage.

 

L’année suivante, il est toujours au volant d’une Rondeau (de Mc Cormack et Dodge, 13e), puis en 1986 il roule pour le compte de Brun Motorsport (avec Thierry Boutsen et Didier Theys, abandon sur accident) et sur une Nissan R86V (avec Patrick Gonin et Anders Olofsson, abandon sur accident) en 1987.

Le moment clé de sa carrière aux 24 Heures du Mans est, sans aucun doute, son arrivée dans une équipe usine en 1989, celle de Jaguar. Il est alors associé avec son frère et à Eliseo Salazar (24 Grands Prix de F1) sur la XJR9 #4. « Il y a d’abord eu la page avec Nissan en 1987 où c’était déjà un peu semi-officiel.

 

Cependant le tournant, c’est Jaguar. Cela a entraîné ensuite mes arrivées chez Sauber Mercedes et Peugeot. J’ai piloté des voitures fabuleuses comme cette XJR9. Cette auto était vraiment super, elle « envoyait", mais on ne s’en rendait pas bien compte. Lorsqu’on nous annonçait qu’on avait roulé à 400 km/h dans la ligne droite des Hunaudières, on n'y croyait pas vraiment ! » Cette année là, il termine 8e non sans avoir laissé son empreinte sur la course puisque le Français signe le meilleur tour en course en 3:21.093. Il remet ça en l’année suivante sur une XJR12, cette fois-ci, avec Martin Brundle et David Leslie. Les trois hommes sont moins chanceux puisque la #1 doit abandonner après 14 heures de course sur un souci de pompe à eau.

Il revient en 1991 pour connaître « l’une des plus grandes déceptions de ma carrière ». Il roule alors sur la Sauber Mercedes C11 #1 avec Jean-Louis Schlesser et Jochen Mass. « Nous étions en tête depuis un moment, nous possédions 45 minutes d’avance, ce qui représentait un bon matelas de tours. Mais à trois heures de l’arrivée, le moteur à rendu l’âme, on ne pouvait plus rien faire, ce fut l’abandon.

 

Par contre, même si nous n'avons pas gagné avec Mercedes cette année là, cela reste néanmoins un super souvenir. J'étais avec Jean Louis et Jochen, c'était top.» 1991 marque plus ou moins la fin des Groupe C avec l'introduction des 3.5 litres.

 

"Le Groupe C, c'était fabuleux. C'est vrai qu'au début, chez Porsche, par exemple, il y avait deux autos officielles et les autres étaient des semi-officielles ou des privées. Quand les usines tombaient en panne, c'était les privées qui prenaient la relève. Et il y avait 30 Porsche...Ensuite, au fil des années, on a eu Jaguar, Sauber Mercedes, Nissan, Toyota, Mazda, etc...C'étaient de belles années de constructeurs, avec beaucoup de concurrence. Lorsque en 1991, on casse avec la C11, c'est la Mazda qui l'emporte !"

Alain Ferté essaie de se remettre de cette déception de 1991 et se concentre alors sur sa saison de DTM avec une Opel Omega 3000 Evo 500 de l'équipe Eggenberger Motorsport. En 1992, il s'engage ensuite en Peugeot Spider. "Lors de la manche de Monza, j'ai rencontré Jean Todt (alors patron de Peugeot Sport). Il m'a dit qu'il voulait me voir le lundi matin Avenue de la Grande Armée, à Paris. Il m'a alors proposé de disputer les 24 Heures du Mans pour Peugeot." Cette nouvelle aventure n'est pas couronné de succès puisque la 905 #31 qu'il partage avec Eric Van de Poele et Karl Wendlinger ne voit pas l'arrivée. 

Il continue de prendre part aux 24 Heures du Mans avec Courage Compétition (1994), Sard (1995 et 1996) et JMB Racing (Porsche 911 GT1 avec Jürgen Von Gartzen et Olivier Thévenin, abandon moteur) en 1997. Après plusieurs années d'absence, le Français revient en 2008 sur une Ferrari 430 GT de JMB puis "la dernière année, je suis venu avec mon ami Philippe (Illiano) sur la Ferrari 458 Italia #83 de JMB Racing (32e au général, 7e en catégorie GTE-Am). C'était en 2012. Je l'ai accompagné, pour lui c'était son rêve d'enfance et cela reste des souvenirs extraordinaires pour tous les deux !"

 

Alain Ferté, fort de ses 14 participations, est un véritable amoureux des 24 Heures du Mans comme il le confie. "A n'importe quelle édition, j'ai toujours été heureux d'être là ! Ce que j'aime au Mans, c'est cet esprit d'équipe, ce n'est pas qu'un individu. C'est une course tellement difficile. Il faut passer le moins de temps dans les stands et le plus sur la piste. Je me rappelle bien de 1990 lorsque la Porsche 962 de Brun Motorsport (Jesus Pareja) casse son moteur dans les 15 dernières minutes alors qu'elle était 2e ! On a aussi vu Toyota en 2016 avoir son souci et perdre Le Mans à quatre minutes de la fin. Ça, c'est Le Mans ! Le scénario ne s'écrit jamais à l'avance. C'est fabuleux pour certains lorsqu'ils gagnent ou font un bon résultat et ça peut être dramatique pour les autres. C'est digne des meilleurs polars."

Il garde donc tpujours contact avec l'endurance qu'il suit régulièrement. Il a bien entendu regardé les dernières 24 Heures du Mans. "Ce fut une belle course, très serré jusqu'au bout surtout au niveau des LMP2 et des GTE. C'est vrai que, par contre, au niveau des LMP1, la course fut moins passionnante, mais nous sommes dans des années de transition."

 

Ayant débuté au Mans en 1983, il y a donc 25 ans maintenant, Alain Ferté possède une bonne vision de l'évolution de l'endurance à travers les dernières décennies. "Cela a bien évolué car l'endurance est maintenant très bien organisée. Il y a de superbes équipes, c'est surtout à ce niveau là que ça a changé. Lorsque je roulais, il y avait les écuries "usine" qui étaient très bien structurées et les autres, ce qu'on appelait les "semi-usine ou semi-privée" ! La différence était notable. Maintenant, on ne la voit plus. Il n'y a plus une seule structure qui fait "peine à voir". Les équipes ont pris conscience de l'importance du championnat dans lequel elles sont et viennent avec du super matériel. La sécurité des pilotes a aussi bien évolué. On voit les secours faire des extractions avant les épreuves. Ça n'existait pas avant, ça a beaucoup changé..." 

 

Il n'en a pas pour autant "lâché le guidon" comme il dit puisqu'on l'a vu rouler en Championnat d'Europe Camions au début des années 2000 (en catégorie Super Truck), puis plus récemment en VdeV et en Championnat de France GT. Cette année, il a disputé la manche du Red Bull Ring en European Le Mans Series au volant d'une Norma M30 (#19) de l'équipe Yvan Muller Racing. "Je me plais dans n'importe quoi, tant que je roule. Cette LMP3 est super bien à piloter et l'équipe d'Yvan Muller est vraiment très bonne. J'ai toujours la même envie, je compte presque 40 ans de sport auto en comptant le karting. C'est dans les gènes. Tant que je me sens rapide et que je fais mon taf, je continuerai !"

 

Par contre, pas d'Alain Ferté en Historique pour le moment même si l'envie est là. "Lors de ma dernière participation aux 24 Heures du Mans, il y avait un plateau de Groupe C en lever de rideau. Je suis allé voir ces anciennes autos dans les paddocks. Je dois bien avouer que ça m'a fait drôle de retrouver des Jaguar surtout quand on les a pilotées à l'époque. De plus, elles sont super bien entretenues et les pilotes attaquent fort ! Si j'avais l'occasion de remonter dedans, je le ferais ! Jusqu'à maintenant, je n'étais pas disponible, j'avais des clash de date lorsqu'il y avait des courses comme Le Mans Classic, par exemple." 

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