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Pierre Dieudonné : "J’ai découvert Le Mans en panneautant une Ferrari à Mulsanne"

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26 mai. 2019 • 9:16
par
Laurent Mercier
Interview réalisée en 2016 #MemoriesSur 11 participations aux 24 Heures du Mans, Pierre Dieudonné a rallié l’arrivée à neuf reprises. Ses débuts remontent à 1977 sur une BMW du Luigi Racing avant de piloter une Ferrari à trois reprises puis de rejoindre les rangs de Mazda avec trois victoires de classe IMSA. Après plusieurs années passées chez ORECA, Pierre Dieudonné apporte son expérience de la course au sein du Belgian Audi Club Team WRT en GT3. Une pause dans le calendrier Blancpain GT Series luin permet de rempiler aux 24 Heures du Mans en tant que coordinateur chez Panis-Barthez Compétition. Grand monsieur de l’Endurance, Pierre Dieudonné nous a fait part de ses débuts au Mans.
“Mes premières 24 Heures du Mans remontent à 1965 mais mon premier souvenir date de dix ans plus tôt, soit l’année du terrible accident. Mon père était un bon ami de Paul Frère et il suivait la course à la radio. J’ai le souvenir de mon père, catastrophé, qui m’a annoncé la nouvelle le dimanche matin. J’avais déjà attrapé le virus et je suis venu aux 24 Heures du Mans en 1965 alors que je terminais mes études en secondaire. J’avais un copain de classe dont le père roulait en Ferrari. C’était l’époque de l’Ecurie Francorchamps. Jacques Swaters faisait rouler les Ferrari et il avait proposé que le fils de son client l’accompagne. J’ai donc fait des pieds et des mains pour l’accompagner. C’est là que j’ai découvert Le Mans de l’intérieur. Il y avait une 250 LM et une 275 GTB jaune. Avant la course, tout le monde était installé dans un château en périphérie du Mans et j’ai donc pu contempler de près ces bijoux.“J’avais tout de même un rôle actif car nous étions chargés de panneauter à Mulsanne. J’ai donc vécu la totalité de la course en ne dormant que quelques heures. C’était assez exaltant car la Ferrari faisait la course en tête le dimanche matin. Malheureusement, vers midi, un pneu a déchapé dans les Hunaudières et la voiture s’est arrêtée devant nous. Elle a tout de même pu repartir mais celle alignée par NART est passée en tête. Pierre Dumay et Gustave Gosselin ont terminé à la 2ème place sur la 250 LM, trois tours devant Willy Mairesse et Jean Blaton. C’était l’époque des Cobra et autres Alfa Romeo.
“Je suis revenu plus tard au Mans en tant que journaliste au début des années 70 pour Virages Auto avant de devenir pilote. Mes débuts derrière le volant remontent à 1977 sur une BMW 3.0 CSL du Luigi Racing que je partageais avec Spartaco Dini et Jean Xhenceval. En 1976, nous avons remporté le titre de Champion d’Europe de Tourisme sur une BMW/Luigi et nous avons rempilé en 1977. Une des manches du championnat se déroulait à Brno en Tchécoslovaquie. En partant à Brno, on s’est dit que si la voiture revenait intacte, alors on pourrait passer par Le Mans pour y disputer les 24 Heures. Nous avons pris contact avec l’ACO qui a accepté que nous passions les vérifications plus tard que les concurrents car il fallait rentrer de Brno. Les contraintes pour être au départ n’étaient pas les mêmes qu’actuellement. Nous avions deux autos et la notre a remporté la catégorie IMSA avec une 8ème place au général. Les BMW étaient réputées pour être solides mais peu rapides. C’était une belle histoire. A cette époque, j’étais toujours dans une optique de monoplace malgré une ou deux participations aux 24 Heures de Spa. Je suis arrivé en Endurance un peu à cause du Tour Auto où j’ai vite eu la réputation de faire attention à la mécanique et d’être quelqu’un de fiable. Pourtant, je n’ai jamais été un grand fan des courses de 24 heures. Pour moi, une course de 24 heures est bien quand elle est terminée. Il y a tout de même beaucoup de moments assez compliqués même si cela reste quelque chose de particulier et de fort. Comme le disait Derek Bell, Le Mans c’est une relation amour/haine. A cette époque, il y avait pas mal de drames. Cependant, quand on est en piste, on met de côté l’aspect danger. Il faut gérer la nuit, la pluie, les pilotes de niveaux différents.Ces dernières années, l’Endurance prend une très belle tournure après 20 ans d’obscurantisme avec les histoires de brides, d’équivalences et de débats stériles. Le Mans avait perdu son rôle de banc d’essai. On pouvait comparer cela au Moyen-Âge. Les années 60, 70 et GrC ont été magnifiques. Aujourd’hui, le banc d’essai est revenu. L’engagement des constructeurs le démontrent. Les courses d’endurance sont un accélérateur de progrès. La catégorie LM P2 est un peu comme le GT3 où les ingénieurs se doivent d’exceller sur les réglages avec une grosse recherche d’optimisation. Les GT3 sont devenues au fil du temps des petites GTE nettement mois chères. Selon moi, il vaudrait mieux avoir une seule catégorie GT et je trouve dommage que le rapprochement ait échoué. Chacun a ses convictions et ses intérêts.Pour ce qui est de la catégorie reine, je pense qu’il y a encore pas mal de champ d’action pour l’hybridation. L’ACO est ouvert à cela. Si un projet hydrogène ou autre arrive, la porte reste ouverte et le Garage 56 est fait pour cela. A terme, la solution peut venir de la pile à combustibles. Le mérite en revient en grande partie à Pierre Fillon qui est quelqu’un de passionné et de très ouvert.”

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