Philippe Dumas : "Le World GT1 a eu le mérite d'exister"
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Meeting
8 mai. 2020 • 9:45
par
Laurent Mercier
Il y a 10 ans, Hexis Racing débutait l'aventure World GT1 avec une paire d'Aston Martin DBR9. Après le FFSA GT et le FIA GT3, le team basé à Lédenon entamait un sacré challenge dans un tout nouveau Championnat du Monde GT1 imaginé par Stéphane Ratel et monté en pleine sortie de crise financière. Souvent comparé à un petit commando, le team emmené par Philippe Dumas et Clément Mateu a fait des merveilles avec les moyens du bord pour arriver jusqu'à une couronne mondiale en 2011. Philippe Dumas, team principal Hexis Racing, est revenu sur cette (trop) courte aventure World GT1 pour Endurance-Classic.
Après le FIA-GT3, le World GT1 était la suite logique ?"Plusieurs facteurs ont favorisé ce transfert GT3/GT1. Il y a tout d'abord le côté sportif où tout est allé un peu vite jusqu'à une place de vice-champion FIA-GT3 en 2008 avec un coup du destin. On s'était armé pour le titre Equipes 2009, ce qui a été réalisé. Cette année-là, l'équipe s'est structurée en ne disputant qu'un seul championnat. C'était un petit programme. En cours d'année, Stéphane Ratel a annoncé le World GT1, mais il fallait pour cela avoir des autos. Le lien déclencheur a été la famille Dor, Frédéric et Yves-Emmanuel, qui nous ont proposé leurs Aston Martin DBR9. Alors, on s'est dit pourquoi pas ?"Il fallait tout de même réunir le budget..."On avait une partie de budget de la part d'Hexis, on pouvait conserver les GT3 pour étaler les coûts du personnel et les DBR9 étaient mises à disposition par la famille Dor, sans oublier nos bonnes relations avec Aston Martin Racing. Tous les partenaires ont donné un peu plus, tout ça mixé avec quelques pilotes qui amenaient du budget. On était tout de même au ras des pâquerettes. Quand j'y repense, c'était un peu fou..."Cependant, vous étiez dans la cour des grands ?"A Abu Dhabi, lors du premier meeting, nous avions un stand avec deux caisses à outils. Même petit, tu peux réussir. C'était la beauté de ce championnat. Il y avait du costaud avec Vitaphone Racing qui, pour moi, reste l'une des meilleures équipes niveau organisation. Pour nous, tout s'est mis en place petit à petit. On avait de l'ambition et on était un peu fou. Michel Mateu (patron d'Hexis) a toujours été un homme de challenge. Quand tu es Champion d'Europe, tu te dis pourquoi pas Champion du Monde..."Malgré le professionnalisme du championnat, vous avez su garder le côté 'petite équipe'..."Tout était fait d'une façon familiale. On était tellement structuré et notre force résidait dans un gros esprit d'équipe. Le seul vrai gros investissement chez Hexis était l'humain. Sur les meetings, nous étions très peu, mais assez nombreux à l'atelier. J'estime avoir pris les bonnes décisions. On avait une dizaine de personnes à l'atelier. C'était plus dur sur les meetings, mais on se connaissait tellement bien que ça passait. Avant de se lancer, il a fallu travailler sur les autos, les réviser."Vous vous retrouvez même derrière le volant dès dès Abu Dhabi. Une surprise ?"Ce n'était absolument pas prévu. Une auto était financée par Hirschi/Piccione, la seconde en grande partie par ACM, partenaire de Jean-Denis Deletraz qui devait rouler avec Fred Mako. Il y a eu un souci avec l'éruption volcanique en Islande qui a fermé l'espace aérien. Jean-Denis n'a pas pu rejoindre Abu Dhabi. J'ai pris mon téléphone pour trouver des pilotes, mais aucun ne pouvait venir jusqu'à Abu Dhabi. Fred Mako avait qualifié l'auto en 1ère ligne et j'ai pris le départ de la toute première manche World GT1 depuis la 1ère ligne à côté de Marc Hennerici."Quel souvenir gardez-vous de ce championnat ? "Si je me détache de l'aventure humaine et sportive, ainsi que de mon amitié pour Stéphane (Ratel), ce championnat était extraordinaire. Il y avait du haut niveau, des courses spectaculaires et des autos qui resteront dans l'histoire. Le championnat avait tout : les autos, l'organisation, le plateau, les destinations. Cela restera comme quelque chose de très spécial. J'ai vécu de belles choses jusqu'à maintenant, mais celle-ci est un peu à part."Une grosse différence par rapport à l'endurance ?"On a eu des résultats grâce à l'esprit d'équipe. On parlait d'un sprint d'une heure. C'était une catégorie simple à comprendre. Ce championnat restera dans l'histoire, mais j'aime aussi l'endurance. En 2011, je suis tombé amoureux de la discipline aux 24 Heures de Spa. Ce World GT1 a eu le mérite d'exister. Maintenant, les autos ne sont plus les mêmes, les moyens non plus. Ce qui est beau et étrange à la fois, c'est que ce championnat restera un peu comme un mythe. Il y avait aussi un World GT1 en 2012, mais avec des GT3, ce qui n'était plus la même chose. Il y avait de plus en plus de GT3 et les GT1 devenaient vieillissantes. Le concept s'est arrêté après deux ans. Le championnat ne s'est pas arrêté parce que ça n'a pas fonctionné, il s'est arrêté parce qu'il devait s'arrêter."C'était différent en World GT1 avec McLaren ?"Les deux saisons avec McLaren ont été fabuleuses. Avec ce programme, on a beaucoup appris et peut-être même que nos meilleures années étaient là. On a beaucoup souffert, mais quelle fierté quand on voit où était l'auto fin 2011 et où elle était un an plus tard." Les destinations du World GT1 étaient tout de même assez improbables..."Grâce à Stéphane Ratel, on a vécu quelque chose de rare et fabuleux. J'ai autant de bons souvenirs de courses que de restos avec l'équipe. Il y a eu l'Argentine, la Muraille de Chine. C'est quelque chose qui marque à vie. C'est aussi pour ça que le championnat restera rare et exceptionnel pour le paddock qui a vécu cette aventure. Des autos d'exception dans des endroits d'exception avec des équipes d'exception et un promoteur d'exception."
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