Les 24H du Nürburgring, LA course qui ne ressemble à aucune autre

L'an dernier, alors que les 24H du Nürburgring furent interrompues au drapeau rouge, durant une bonne partie de la nuit, et ce en raison de trombes d'eau s'abattant sur la piste, beaucoup de suiveurs furent surpris de voir que l'ensemble des bolides put regagner son box (plutôt que d'être mis en parc fermé) et que les mécaniciens avaient tout le loisir d'œuvrer sur les bolides en question.

Ce qui, en fait, est tout à fait conforme à la philosophie de cette course ô combien atypique et qui, rappelons le, ne compte pour AUCUN championnat.

Lorsque j'ai assisté pour la première fois (en 1997) à cet évènement à nul autre pareil, Marc Duez avait signé une étonnante pole position avec une BMW 318 tds qui effectuait ses premiers pas en compétition. Alors que j'étais posté dans la descente d'Adenau (Breidscheid) pour le départ, je ne vois pas le poleman passé devant moi et mon "voisin" me rétorque qu'il est rentré aux stands suite à des soucis techniques. En moi-même je me demande" comment a-t-il pu rentrer aux stands alors qu'il n'a pas bouclé le premier tour?" Et là j'ai vite compris l'une des particularités des 24h Stunden qui, pour rappel, empruntent à la fois le circuit de GP et la Nordschleife. Si un souci quelconque vous arrive sur le Grand-Prix Strecke, vous avez tout le loisir de rentrer directement aux box sans devoir effectuer une ronde complète. Ce qui en soit est assez logique et plutôt sécurisant, surtout en cas de crevaison où vous n'êtes pas contraint d'effectuer une ronde de 20 kms avec un pneu en lambeaux.

En 2003, BMW Motorsport créait le buzz en alignant deux BMW M3 GTR E46 qui, d'ordinaire, évoluaient  en American Le Mans Series. Marc Duez, encore lui, étant inscrit sur les deux Bavaroises à la mélodie envoûtante. Alors qu'il faisait très chaud au moment du départ, les mécaniciens apposaient de la glace sur le compartiment moteur afin d'éviter tout risque de surchauffe lors du très long tour de lancement effectué à allure réduite. Las, le lubrifiant n'appréciait guère ce traitement de faveur et les deux BMW officielles s'arrêteront d'emblée en bord de piste. Deux camions plateaux se chargeront de les ramener aux stands via les…routes environnantes et, après réparation, elles pourront prendre part à la fête pour le plus grand bonheur de leurs pilotes et bien évidemment du public. L'exemplaire piloté par Jörg et Dirk Müller, Claudia Hürtgen, et Marc Duez effectuera d'ailleurs une jolie remontée dans le Top 6 avant d'abdiquer en vue de l'arrivée.

Par ailleurs, l'aide "extérieure"  n'est pas proscrite lors des 24h. Ainsi si, par exemple, vous tombez en panne d'essence, vous êtes libre de demander un jerrycan à un des très nombreux spectateurs, lequel se fera une joie de vous dépanner. En cas de panne mécanique, il est courant qu'un véhicule d'intervention ramène la" bête blessée" jusque dans la voie des stands ou l'immobilise dans un des nombreux parkings jouxtant la Nordschleife. Libre ensuite au pilote de faire appel à ses mécanos afin qu'ils viennent lui permettre de regagner la ronde. Comme par exemple, en 2011, Christian Kohlhaas (Audi RS4) qui, après l'intervention salvatrice de certains membres du Götz Motorsport, put achever l'épreuve au 71e rang tout en se hissant sur le podium de la classe SP8T!

L'anecdote la plus cocasse me vient cependant du Belge Jacky Delvaux, célèbre pour ses nombreuses participations avec ses différentes Renault Clio. Alors que "sa" voiture n'était plus passée par la pit-lane depuis un sacré bout de temps, il décide d'aller à "sa rencontre" et l'aperçoit rangée le long du rail. Le commissaire en fonction lui signale que le pilote à son bord est tombé malade et a rendu dans la voiture! Jacky demande si le pilote en question peut repartir et le marshall lui répond par la négative: "Il est malade et si je le laisse repartir et qu'il provoque un accident je serai jugé responsable. En revanche tu peux prendre le volant et ramener la voiture aux stands!" Ce que l'Ardennais fit sur le champ! C'est cela la magie du ring!

Avec l'avènement de la catégorie GT3 et l'aseptisation des circuits "modernes", les 24H du Ring n'ont cessé de prendre de l'ampleur. Les constructeurs allemands ne s'y trompent pas et, depuis plusieurs années déjà, déploient l'artillerie lourde afin de remporter cette course UNIQUE au monde.

Le public qui, auparavant était constitué presqu'exclusivement  d'autochtones, s'est également grandement élargi, au point que les dernières éditions (du moins celles courues dans des conditions "normales", nous y reviendrons) se sont disputées devant une affluence supérieure à celle du Mans…tout en gardant sa propre philosophie! Et c'est très bien ainsi!