IMSA - Le casse-tête de la mise en chauffe des pneumatiques à Daytona
En début d’année 2023, le WEC a pris une décision radicale : interdire les armoires de chauffe des pneumatiques pour des raisons écologiques. Si cette mesure a provoqué une levée de boucliers parmi les pilotes - certains ont rencontré des problèmes en piste - et les équipes, elle a finalement été suspendue à l’occasion des 24 Heures du Mans. En IMSA, la situation est différente : cela fait longtemps que les équipes évoluent sans chauffe préalable des pneumatiques. La raison est que les conditions climatiques sur le circuits américains où se déroulent les courses sont plutôt bonnes... Sauf à Daytona fin janvier.
Les 24 Heures de Daytona, première course de la saison, sont connues pour leurs incertitudes météorologiques et leurs larges variations de température. Cette année, la Floride, surnommée Sunshine State, déroge à sa réputation. Habituellement la course commence sous un soleil généreux à 13h40 avec une piste avoisinant les 40°C, les températures chutent rapidement avec la tombée de la nuit, vers 18 heures, sous l’influence des vents de l’Atlantique. Cette édition devrait être particulièrement fraîche, avec des températures oscillant entre 5°C et 16°C, bien en dessous des normales de saison.
Une gestion des pneus cruciale
Manufacturier pneumatique unique de la série, Michelin fournit aux concurrents de la catégorie GTP deux mélanges de gomme, appelés Médium et Soft. Chaque pilote doit choisir un total de 33 trains de pneus (au maximum 25 médiums et 14 soft) pour la totalité du meeting (Roar + course). 21 sont à conserver pour la qualification et course. Le règlement de l'IMSA définit une fenêtre temporelle pour l'utilisation du mélange le plus tendre. « S'il est plus performant à basse température, le mélange Soft est aussi nettement plus fragile", précise cependant Brandon Fry, chef ingénieur du Porsche Penske Motorsport en IMSA. Avec la gomme tendre, il ne s'agit pas seulement d'extraire la performance, mais aussi de la gérer sur la durée ».
Les pneus tendres excellent pendant les premiers tours car ils montent rapidement en température et offrent donc une adhérence optimale plus tôt. Revers de la médaille, ils se dégradent plus rapidement que les Medium, ce qui se traduit par des chronos moins probants en fin de relais. Mais l'une des forces de Michelin reste de fabriquer des pneus dont les performances sont constantes. Un fait qui a été relevé par de nombreuses écuries.

Piloter dans des conditions extrêmes
Pour les pilotes, les défis sont nombreux. « S’adapter à des conditions changeantes à chaque sortie des stands est un exercice complexe, confie Felipe Nasr, champion en titre au volant de la Porsche 963 n°7. Ceux qui parviennent à exploiter rapidement le potentiel du pneu dès le premier tour peuvent gagner une ou plusieurs positions. Avec des pneus froids, même des voitures plus lentes, comme les LMP2 et GT, ont l’avantage sur les zones de freinage et en termes d’adhérence. Une bonne lecture de la situation est donc cruciale, mais loin d’être simple ».
En LMP2 et en GT, les pilotes ne s'en inquiètent pas. Mais Lilou Wadoux, seule pilote française au départ (sur une Ferrari 296 GT3 de l'écurie AF Corse) reconnaît le côté délicat de la tâche : « Je n'aimerais pas être à la place de ceux évoluant en GTP à ce moment-là » souligne-t-elle. « Ce sera, sans nul doute compliqué, reconnaît par ailleurs Kamui Kobayashi, qui partage le volant de la Cadillac V-Series.R n°40 avec Jordan Taylor et Louis Delétraz. En WEC, ce que nous craignons quand nous partons en pneus froids, c'est le graining. Ici, en raison du banking, ce n'est pas un souci. C'est mieux, mais les tours de sortie n'en demeurent pas moins complexes et te font perdre énormément de temps. Même sur le banking tu ne peux pas être à fond. Et toi, au volant, tu ne peux rien faire... » A part prendre son mal en patience.
Dans un contexte où chaque seconde compte et où la météo extraordinairement froide va jouer les trouble-fête, la gestion des pneumatiques à Daytona s’annonce plus déterminante que jamais. Les équipes devront jongler entre performance et endurance, et s'adapter à chaque sortie en pneus neufs dans le trafic. Un défi digne de cette épreuve mythique, qui pourrait bien redistribuer les cartes jusqu’à la dernière heure de course.
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