WEC / IMSA – La nouvelle gamme de pneumatiques Michelin Hypercar / GTP repoussée à 2026
Tous les deux ans, Michelin est supposé amener une nouvelle gamme de pneumatiques pour les catégories Hypercar / GTP. Mais pour diverses raisons, ce ne sera pas le cas en 2025. Est-ce un renoncement ? Certainement pas, mais une décision destinée à ne pas importuner les concurrents et les organisateurs de par un planning trop serré. Explications...
Où en est le développement de la nouvelle gamme de pneumatiques MICHELIN Hypercar / GTP ?
« Nous avons commencé les premières boucles de développement en 2023, nous a rappelé Pierre Alvès, directeur des opérations Endurance chez Michelin Motorsport. Le processus est long, nous apprenons à chaque séance. Après chacune d'elles, nous procédons à une analyse approfondie puis refaisons des pneus que l'on teste un peu plus tard, raison pour laquelle les différentes boucles sont assez espacées. La dernière remontait à Bahreïn, en novembre dernier, juste après la course. Nous avions alors fait des essais pour le cran Hard car le circuit s'y prête, et avions axé le développement sur les matériaux durables. Les Slicks actuels en sont constitués à 30% et l'objectif est d'atteindre 50% avec la nouvelle gamme. »
Aucun séance n'a donc été organisée depuis novembre ? « Non, nous a répondu Pierre Alvès. Une autre boucle de développement était prévue en mars dernier, à Portimão pour les concurrents du WEC, et à Sebring pour ceux de l'IMSA. Mais celle de Portimao est tombée à l'eau en raison de la pluie. Cela nous a fait perdre énormément de temps car nous n'avons pu retrouver un autre créneau en raison des plannings très chargés des concurrents. L'idée était de tester avant fin juin, mais l'unique solution trouvée a été celle de venir à COTA (Austin. Ndlr) fin juillet car bon nombre de concurrents avaient prévu d'y rouler pour préparer le Lone Star Le Mans (1er septembre. Ndlr). »
Une séance qui s'est tenue la semaine passée, le 27 juillet exactement, dans la foulée de deux journées d'essais privés. « La séance a été un peu perturbée en début de journée par une piste mouillée, nous a relaté Pierre Alvès. La matinée fut dédiée aux tests des technologies innovantes et l'après-midi à l'évaluation d'une sélection de ces nouvelles solutions en long run afin de valider leur endurance et leur constance. Le retour des pilotes a été globalement positif, et a permis de mettre en avant les améliorations que nous devons apporter pour notre prochaine séance. »

Tous les constructeurs avaient répondu présent en dehors de Acura, Isotta Fraschini et Alpine, qui a décliné car en attente des nouvelles pièces supposées résoudre les soucis de fiabilité rencontrés par son V6 turbo Mecachrome et susceptibles d'être introduites pour la prochaine course, sur ce même Circuit des Amériques, à Austin (Texas).
Pourquoi ce changement de plan ?
La question, nous l'avons posée à Matthieu Bonardel, directeur de Michelin Motorsport. « Le pneu censé être issu de la séance menée à COTA devait être introduit pour l'IMSA Sanctioned Test de Daytona, en décembre, nous a-t-il répondu. Mais pour diverses saisons (évoquées en amont. Ndlr), nous nous sommes rendus compte que nous ne serions pas capables d'y parvenir. Nous avons proposé d'introduire le pneu pour le mois de mars, pour les 12 H. de Sebring et les 1812 km du Qatar. Mais en raison de la BoP et du fait que l'IMSA débute par la course la plus longue et la plus importante de la saison (les 24 Heures de Daytona. Ndlr), amener une nouvelle gamme en milieu d'exercice devenait un élément perturbateur pour les écuries. »
« Après discussion, nous avons donc décidé de décaler l'introduction de la nouvelle gamme à la saison suivante, avec une première sortie officielle probable lors de l'IMSA Sanctioned Test de Daytona, en décembre 2025, a-t-il enchaîné. La gamme actuelle fonctionnant bien, autant finaliser la prochaine correctement, en totale collaboration avec les teams. Nous voulons amener de l'innovation, mais sans créer de problèmes. »

Faut-il comprendre que la périodicité des nouveautés introduites à la gamme Hypercar est amenée à évoluer ? « Absolument pas, nous a assuré Matthieu Bonardel. La gamme suivante est prévue pour 2028. Notre cycle de nouveautés est toujours de deux ans et n'a pas pour but d'être rallongé. Et dès 2026, on va s'attaquer à la gamme 2028. »
Qu'est-ce que cela change pour les concurrents ?
Cette décision, sage, est tout à l'honneur du manufacturier pneumatique clermontois qui, bien que toujours en quête de solutions innovantes à même de faire parler de ses produits, ne veut pas pour autant que cela complexifie la tâche des concurrents et des organisateurs. « Tous sont soulagés et reconnaissent par la même occasion que la gamme actuelle fonctionne, nous a confirmé Matthieu Bonardel. Tous s'y sont habitués. Les équipes ont trouvé les bons réglages pour les faire fonctionner. Avant, tant en LMP1 qu'en GTE, ils avaient droit à un service à la carte. Maintenant tu as un menu et tu dois t'y adapter... »
Et ce d'autant que ce report leur donnera le temps de l'apprivoiser. « La séance de COTA n'a donc pas été la dernière séance, a poursuivi l'ingénieur français. Nous allons en refaire, après Bahreïn cette année, mais aussi l'année prochaine, probablement dans la foulée des courses, ce qui facilitera la tâche aux équipes, déjà sur site. Mais notre développement devrait être finalisé ou presque avant Le Mans 2025, ce qui leur permettra également de compter sur cette nouvelle gamme lors des essais menés à bien durant le second semestre 2025. »

Quels sont les objectifs de cette nouvelle gamme ?
Finalement pourquoi changer alors qu'aujourd'hui l’ensemble du plateau s'est habitué aux gommes introduites début 2023 ? « Nous sommes plus que satisfaits de ce que nous avons pu faire en Slicks et en Pluie sur la gamme actuelle, nous a répondu notre interlocuteur. Mais là, nous cherchons à aller plus loin encore, notamment en passant de 30 à 50% de de matériaux durables sur le pneu Slick. Et ce tout en gommant les petits défauts de la gamme actuelle, notamment la mise en régime des pneus Hard, la longévité du pneu Medium ou encore la polyvalence du pneu Pluie. »
Un pneu Pluie qui, il est vrai, a - un temps -beaucoup alimenté les conversations dans les paddocks, du WEC principalement. « Je pense que cela est surtout dû au fait que la donne a beaucoup changé pour les concurrents, nous a-t-il expliqué. Avant, ils avaient un pneu Pluie et un pneu Hybdride (slick fonctionnant sur piste séchante. Ndlr) qu'ils pouvaient même retailler. Dorénavant, il y a un seul et unique pneu Pluie, un produit un peu couteau suisse. »
En quoi s'agit-il d'un défi différent pour Michelin ?
La mission est coriace pour Bibendum, car la donne change par rapport à la gamme actuelle, qui aura donc été utilisée en 2022, 2023 et 2024. « Le défi est différent car nous testons des nouvelles technologies et matériaux, confie Matthieu Bonardel. Nous sortons du champ du connu et nous avons besoin de datas, d'autant que nous ne voulons pas que cela réagisse différemment d'une voiture à l'autre. Il nous faut donc plusieurs roulages, et ce avec un maximum de constructeurs. Et il ne faut pas oublier que la dernière fois, au moment du développement, seul Toyota roulait. Là, nous avons huit constructeurs à convaincre du bien fondé de la gamme. »

Des datas à emmagasiner sur piste pour pouvoir nourrir les outils de simulations, qui ont tant servi pour définir la gamme précédente. « La simulation nous permet de faire des assemblages, mais il faut quand même générer un certain nombre de données, plus encore quand nous utilisons de nouvelles technologies et matériaux car le simulateur ne sait pas quel effet cela va avoir sur un pneu actuel, nous a expliqué Matthieu Bonardel. Ces données acquises, nous pouvons faire évoluer nos modèles dans le simulateur. Raison pour laquelle nous ne pourrons nous abstenir de faire des roulages parce qu'il faudra toujours générer l'information brute. »
Certes, mais cela devait déjà être le cas avec la gamme actuelle n'est-ce pas ? « Non, car nous étions partis sur des données connues de la gamme Hypercar 2020-2021, nous a-t-il répondu. Le défi avec la gamme actuelle, la deuxième génération, a été la suppression des armoires chauffantes et la mise en commun des gammes WEC et IMSA, où les circuits et les températures diffèrent de manière assez notable. Mais, encore une fois, nous partions de solutions technologiques connues. »
Pour savoir ce que Michelin nous réserve avec sa nouvelle gamme, il va donc nous falloir patienter encore un peu, mais gageons que présentation et informations seront distillées tout au long de la saison à venir...
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