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IMSA - Sean Creech Motorsports et Lance Willsey rendent hommage au Canada

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9 juil. 2024 • 16:00
par
EI
Entre le Canada et la famille de Lance Willsey, c'est une histoire qui remonte à une époque trouble de notre histoire. Ce week-end, la Ligier JS P217 de Sean Creech Motorsports portera le drapeau du Canada.
Photo : Sean Creech

On fait du sport auto pour le sport mais aussi pour raconter des histoires. Certaines sont plus joyeuses que d'autres mais celle  vécue par Lance Willsey et sa famille doit être racontée. Sean Creech Motorsports va faire rouler sa Ligier JS P217 en IMSA en fin de semaine sur le Canadian Tire Motorsport Park (CTMP) et la LMP2 porte le drapeau du Canada pour le plus grand bonheur de Lance Willsey, le coéquipier de Joao Barbosa.

 

L’histoire de ce drapeau canadien est celle d’une famille, d’une pièce cachée, d’un départ de la Tchécoslovaquie durant la Seconde Guerre mondiale vers un nouveau pays, le Canada.

 

🇬🇧 The extraordinary story behind the Sean Creech Motorsport Canadian Flag livery

 

« La famille de ma mère s’est installée à Niagara Falls, en Ontario, lorsqu’elle a été contrainte de quitter Sered, en Tchécoslovaquie, en raison des conditions oppressantes imposées au peuple juif à la fin des années 30, début des années 40 », a déclaré Lance Willsey, qui disputera également les deux courses de 45 minutes du VP Racing Challenge en Ligier JS P320. « Je suis très reconnaissant au Canada de les avoir accueillis, c’est pourquoi je leur rends hommage chaque année avec la livrée feuille d’érable. »

La ville de Sered, située à l’est de Bratislava, est tristement connue pour son camp de concentration durant la Seconde Guerre Mondiale où 13 500 juifs ont été déportés vers les camps de la mort. La famille de la mère de Lance Willsey vivait à Sered où elle possédait différentes entreprises assez prospères.

 

« A un moment, les puissances de l’Axe* se sont intéressées à la recherche de mon grand-père, principalement parce qu’il était un homme assez riche, un homme d’affaires prospère et un leader au sein de la communauté », se souvient Willsey. « Ils l’ont cherché et sont venus à la maison à plusieurs reprises pour le retrouver. Ils ont épargné ma grand-mère parce qu’elle était catholique et ont épargné ma mère et mon frère – ma mère avait probablement cinq ou six ans à l’époque, et mon oncle était un nourrisson. 

 

« Rapidement, il est devenu intenable pour mon grand-père d’essayer de rester à la maison. Lorsque les militaires sont venus le chercher, il a quitté la maison et est allé vivre dans les bois, parce qu’il ne pouvait pas revenir à la maison en toute sécurité. La famille a perdu le contact avec lui et elle ne savait pas où il se trouvait, ni s’il était en sécurité ou non. »

 

L’histoire de famille prend une autre tournure quand la grand-mère de Lance Willsey fit construire un faux mur dans la maison et a plaça le poêle à bois devant pour le cacher. Alors, son mari rentra pour l’installer dans la minuscule pièce avec comme seul espace une ouverture pour lui donner à manger. L’homme passa des mois sans voir la lumière du jour, sans aucun contact humain, à l’exception de quelques mains qui se posaient sur la sienne à travers ce trou. Au fil du temps, la famille s’est réduisit à peau de chagrin, les membres étant emmenés petit à petit pour ne jamais revenir. L’affaire ne s’arrêta pas là puisqu’un exil commença peu de temps après. 

Photo : LAT

« La famille de mes grands-parents, y compris les frères et les oncles de ma grand-mère, a vendu tout ce qu’elle pouvait vendre compte tenu des contraintes qui pesaient sur elle, et a converti l’argent en diamants, qui étaient la forme de richesse la plus dense avec laquelle ils pouvaient voyager », précise Willsey. « Elle a ensuite acheté des billets de train pour chaque personne afin de prendre un train vers une destination incertaine. Ils ne savaient pas où ils finiraient, ils confiaient à quelqu’un le soin de sortir la famille de là. Il s’agissait simplement d’un endroit où les juifs pouvaient vivre en toute sécurité. »

 

Entre les faux planchers de wagons et les bus, la famille s’est retrouvée à Niagara Falls dans l’Ontario, avec les vêtements qu'elle avait sur le dos et les diamants qu’elle avait dans ses poches afin de débuter une nouvelle vie.

 

« Chacun des frères et des oncles a créé une entreprise différente, dont certaines subsistent encore aujourd'hui », explique Willsey. « L'un d'eux s'est lancé dans la vente de vêtements, et je crois que son magasin existe toujours à Niagara Falls. Mon autre oncle s'est lancé dans l'industrie du bétail et du conditionnement de la viande, et mon grand-père s'est lancé dans l'habillement avec ma grand-mère, qui cousait des vêtements dans leur atelier et l'aidait à remplir sa voiture de vêtements lorsqu'il parcourait l'Ontario en vendant des vêtements à l'arrière de son break. C'est ainsi qu'ils ont redémarré leur vie ».

 

Une fois la guerre terminée, la vie a repris son cours en Tchécoslovaquie : « Heureusement, il y avait à Sered quelques amis non juifs qui s'accrochaient à certains de leurs biens, dans l'espoir qu'ils survivraient et qu'ils pourraient être réunis un jour. Après la guerre, ils ont pu récupérer certains de leurs meubles et quelques œuvres d'art. Des objets qui leur rappelaient leur pays. Beaucoup d'entre eux sont encore là, je les vois chaque fois que je vais au Canada. »

 

C’est donc le cœur serré que Lance Willsey revient chaque saison rouler au Canada : « J'éprouve donc un sentiment de gratitude envers le Canada, car c'est lui qui a offert une destination, un havre de paix à la famille de ma mère. Le frère et l'oncle de ma mère vivent toujours à Toronto, même si, lentement, avec le temps, cette génération s'en va. Mettre le drapeau canadien sur notre voiture de course est ma façon de me souvenir d'eux, de me souvenir que le Canada était prêt à les accueillir. C'est ma façon de les remercier. »

 

 

*Les trois principaux partenaires de l’Alliance de l’Axe sont l’Allemagne, l’Italie et le Japon. Ces trois pays reconnaissent la domination de l’Allemagne et de l’Italie en Europe continentale, et celle du Japon à l'est de l'Asie. Cinq autres États européens rejoignent l’Axe au cours de la Seconde Guerre mondiale. Tous participent à des degrés divers à la persécution et à l’assassinat des

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