Vis ma vie...

Dimanche soir, une page va se tourner à Barcelone. WRT met un terme à sa collaboration avec Audi pour passer dans le camp BMW. Juste un changement de plus dans le paddock me direz-vous... France Gall vous dirait que "c'est peut-être un détail pour vous mais pour moi ça veut dire beaucoup". Endurance-Info a grandi avec WRT depuis la création de l'équipe et même avant. J'ai le souvenir d'une discussion avec Vincent Vosse, venu en touriste sur une manche FIA GT, me confiant qu'il allait monter une équipe qui allait s'appeler W Racing Team (au début on ne parlait pas encore de WRT) avec des Audi, qu'il croyait mordicus que la catégorie GT3 allait décoller et qu'elles deviendraient les reines des 24H de Spa. Soit ce type était fou, soit il était visionnaire. On connaît la suite... 

Bref, cette fin de collaboration avec Audi vaut un dernier entretien avec Vincent Vosse sur l'aventure avec Audi. J'ai aussi quelque chose à lui demander. Ceux qui me connaissent savent que je suis un collectionneur dans l'âme, principalement du papier, mais pas uniquement. Les souvenirs sont conservés dans la tête mais il faut aussi qu'ils soient concrets. Depuis le lancement de l'équipe, j'ai dû me déplacer sur 95% des courses où a roulé WRT sur les meetings SRO. 

 A la fin de l'entretien, je veux donc lui demander une pièce d'une Audi/WRT. Juste pour la conserver dans mon bureau. L'interview se passe sur la terrasse WRT à l'abri des regards car la structure belge est très prisée depuis la présence de Valentino Rossi. Comme avec d'autres acteurs de l'Endurance, il y a une vraie confiance mutuelle. Il faut donc faire la part des choses entre ce qui peut être dit publiquement et pas. On revient donc sur l'aventure avec Audi, sur la future collaboration avec BMW, tout cela Coca à la main pour l'un, une bouteille d'eau pour l'autre. Il est 15h et dans une heure, il y a le traditionnel point presse avec Valentino Rossi. Les fans, tous en jaune, sont déjà nombreux à l'extérieur pour attendre leur idole. L'icône italienne a fait venir des milliers de personnes sur les circuits cette année. En début de saison, le deal était clair : pas d'interview en face à face avec Valentino Rossi. Uniquement un point presse sur chaque meeting. Heureusement car il ne roulerait pas beaucoup, tant les sollicitations sont nombreuses. J'avais eu la chance de le faire en 'one to one' en mars dernier lors des essais du Paul Ricard. Valentino Rossi a la particularité de dégager quelque chose par son charisme mais on a aussi l'impression que c'est le pote avec qui tu peux aller boire des bières. Un mec simple qui prend aussi le temps d'écouter les autres. 

Trouver des questions sur chaque meeting n'est pas trop compliqué surtout que le gars est un vrai bavard. L'heure tourne, il est 15h40. L'entretien avec Vincent se termine, on parle de tout et de rien. C'est alors qu'un gars arrive, me sert la main avec le sourire et s'assoit à mes côtés. J'avoue être un peu surpris de la situation. Je me dis un instant qu'il attend Vincent. Le gars en question est Valentino Rossi et il n'attend personne. Enfin si, il est là pour répondre aux questions... que je n'ai pas. Enfin si, j'avais des questions pour le point presse : le passage de Audi à BMW, 2023, Le Mans. Etant pourtant ancien motard et même ancien moniteur moto-école, je ne peux pas dire être un inconditionnel du monde du deux-roues. Je n'ai pas le moindre selfie ou le moindre autographe de Valentino Rossi que je prends pour un pilote comme les autres tout en ayant conscience de ce qu'il représente. Je pense être le seul journaliste sur cette terre que Valentino Rossi vient voir spontanément (avec sans aucun doute l'aide en douce de Vincent) et qui n'a pas préparé la moindre question pour lui. Le temps d'une seconde, tu te dis "elle est où l'embrouille ?" Evidemment, Vincent Vosse se marre, bien content de son coup. Ma première question est très conne. 

Vale, que penses-tu de Vincent ? 

Vincent est un vrai team principal, le genre de mec qui travaille beaucoup, qui se donne à fond pour son équipe. Ce team dégage une vraie atmosphère et Vincent y est pour beaucoup. La première fois que j'ai vraiment entendu parler de WRT, c'était durant les 24H du Mans 2021 que commentait Dindo Capello pour la télévision italienne. Bien sûr, je connaissais l'équipe de nom car j'avais roulé à deux reprises en Blancpain GT Series. J'ai suivi Le Mans et j'ai vu ce qu'a fait WRT. Ensuite, Vincent est venu vers moi quand j'ai décidé de mettre un terme à ma carrière en MotoGP. Vincent est très clair et c'est quelqu'un qui va droit au but. 

Je n'ai pas le moindre regret d'être venu chez WRT. Ici, c'est une vraie famille. Quand Vincent est venu me voir pour me dire qu'il y avait un souci avec Audi que WRT risquait de changer de marque, je n'étais pas très content. Ensuite, j'ai dit "ok je suis avec toi." 

L'heure tourne, Valentino Rossi parle et parle encore. l'entretien est plus un échange qu'une interview. Il vise clairement les 24H du Nürburgring 2023 et Le Mans 2024. Avant cela, il va y avoir une nouvelle saison en GT World Challenge Europe avec WRT et BMW. Il y a aussi un projet où il pourrait avoir le rôle de team manager sur une course d'endurance et où on ne sait pas vraiment si c'est du lard ou du cochon. Certainement un nouveau plan à la Vincent Vosse, le gars qui m'a donné il y a quelques années une interview en roulant dans une Corvette Z6 dans les contre-allées de Laguna Seca. Vincent est aussi le gars qui m'a appelé un jour pour me faire essayer une Audi R8 LMS GT3 à Navarra. Cette fois-là, je m'étais dit que le mec était complètement fou. Il était pourtant bien sérieux. 

Samedi 1er octobre, 5h19, je n'ai pas encore ma pièce d'Audi R8 LMS GT3 et ma demande était peut-être un peu trop osée car Vincent Vosse est bien capable de vous livrer un châssis nu d'Audi R8 LMS GT3 à domicile avec le message : "Tu voulais une pièce ? Voilà une pièce !"