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Rick Mayer (Risi Competizione) :"Le Mans, c'est je t'aime, moi non plus"

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13 juin. 2019 • 9:00
par
claudeenduranceinfocom

Rick Mayer, ingénieur de Course de Ferrari 488 LM GTE-Pro team #89 du Risi Competizione, a délivré sa vision des 24 Heures du Mans, et en particulier de l'édition 2019. Le team américain revient dans la Sarthe avec la ferme envie de bien faire. La Ferrari 488 GTE est partagée par Oliver Jarvis, Jules Gounon et Pipo Derani.

Le Mans, en général : "Le Mans et moi, nous avons une relation « je t'aime, moi non plus » ; c'est une épreuve très difficile et j'ai hâte d'arriver à la fin de la course chaque année. On espère que la nuit du vendredi ne soit pas longue pour les mécaniciens car le warm-up est à 9h le samedi matin et que la course commence à 15h. On doit être si tôt sur le circuit le samedi que cela signifie que l'équipe travaille non-stop pendant à peu près 40 heures, à condition qu'on soit à l'arrivée. C'est un combat continu pour trouver le bon rythme, maintenir sa concentration et ne pas s'épuiser, particulièrement le dimanche matin. Au mieux, vous pouvez espérer quelques siestes de 10 ou 15 minutes si vous pouvez y arriver.

Le circuit fait plus de 13,5 km et pour les GTE, on est en-dessous des quatre minutes au tour. La télémétrie et la couverture radio sont bien mieux cette année (c'était au moins le cas pendant la Journée Test), ce qui change considérablement par rapport aux années précédentes. Cela prend à peu près 15 minutes pour faire un seul tour chronométré, quand on inclut le tour de sortie et le tour de rentrée. On dispose d'un total de 10 heures d'essais avant la course, mais le nombre de tours durant ces essais est faible, en comparaison des courses sprint américaines ou européennes en raison de la longueur du circuit. Nous avons monté le moteur de course pour la Journée Test, car un kilométrage minimal du moteur est important avant la course. Comme il pleut habituellement en essais et/ou pendant la course, on doit seulement espérer d'avoir le set-up et les autres choses essentielles réglées sur le sec. Les prévisions météo changent chaque jour, mais c'est pareil pour tout le monde.

La Balance de Performance évolue constamment et a été un sujet de discussions lors de nombreuses épreuves. Comme l'ACO et la FIA peuvent apporter des changements à à la BOP jusqu'au jour de la course (principalement pour ce qui concerne la puissance et le poids), personne ne sait vraiment les performances véritables des autres avant que la course ne commence."

Le set-up : "Le plus important, c'est d'avoir une voiture fiable ; pour gagner, il faut être à l'arrivée. Il faut que la voiture convienne à tous les pilotes, avec tous les styles de pilotage qui leur sont propres. Les virages Porsche sont une bonne indication pour le set-up car si la voiture y est bien, elle est probablement bien partout. On espère avoir un très bon set-up pour le départ à partir de ce qu'on a appris pendant la Journée Test et y apporter seulement quelques petites modifications pour la course."

La préparation : "Elle est semblable à celle de la plupart des courses de 24 Heures. La plupart des pièces et des systèmes sur la voiture ont un temps d'utilisation recommandé par le constructeur pour les courses de 24 Heures, ce qui n'est pas fortuit. La semaine entre la Journée test et la course est utilisée pour remplacer, inspecter ou reconstruire de nombreuses pièces. Même si le set-up est parfait et que les pilotes s'y sont habitués, on doit boucler suffisamment de tours pendant les essais libres et les qualifications pour être certains que toutes les pièces et les systèmes qui ont été remplacés fonctionnent proprement. Il y a une marge étroite entre le temps de piste nécessaire pour valider le bon fonctionnement et un temps de piste trop important, qui réduit a durée de vie des points que vous voulez contrôler."

Une conduite en course différente : "C'est une course éprouvante ; les pilotes et les mécaniciens doivent être concentrés à 100% pendant la totalité des 24 heures et plus. Les pilotes doivent rouler à une allure tranquille, prudente mais rapide. Ils doivent prendre de la marge dans les zones de freinage au cas où ils arriveraient sur quelques fluides, ds débris ou du gravier imprévus ou d'autres anomalies sur la piste, particulièrement dans les virages qui n'ont pas beaucoup de dégagements. Nous courons en catégorie GTE Pro, donc nous doublons et nous faisons doubler. Les pilotes doivent laisser le passage quand ils se font dépasser par des voitures plus rapides ou quand ils doublent les voitures plus lentes du GTE-Am. Ils passent autant de temps à regarder dans les rétroviseurs qu'ils regardent vers l'avant. Le secret du succès ici est de rester sur la piste et ne pas avoir à rentrer dans le stand. Pensez-y à chaque dépassement -il vaut mieux perdre une seconde ou deux sur la piste que de passer des minutes ou des heures au stand. On gagne au Mans en évitant de passer au stand et sur la voie des stands.

Ces quelques dernières années l'ACO a mis en place des slow zones pour éviter de déployer les safety cars. Les pilotes maintiennent une vitesse de 80 km/h dans les secteurs où les commissaires de piste sont nécessaires pour dégager une voiture du bac à gravier, pour remettre la piste en état, etc. Le Mans possède neuf slow zones avec des systèmes lumineux dans les voitures pour préciser leurs lieux d'activation. Ceci amène malheureusement de façon aléatoire un gain ou une perte de temps en course. Les slow zones sont activées par le directeur de course quand c'est nécessaire et prennent fin quand le Directeur de Course est certain du bon état de la piste. On peut gagner ou perdre 30 secondes ou plus de façon aléatoire. Les slow zones ont considérablement réduit le déploiement des safety cars (il y a trois safety cars distincts au Mans, ndlr). Si on prend soin de davantage de petits problèmes, cela permet à la course de continuer à progresser. Si on a une voiture rapide exempte de problèmes, cela pourrait tourner à notre avantage. Si on doit passer du temps au stand pour réparer, cela devient presque impossible de regagner les tours perdus. Cette année, le directeur de course a ajouté l'option de déployer une Full Course Yellow qui impose à toutes les voitures de rouler à 80 kmh sur tout le circuit et qui n'a pas été utilisé au Mans auparavant. Les autres séries appellent ceci un safety car virtuel . Durant le Full Course Yellow les stands resteront fermés, donc le Full Course Yellow fige essentiellement les positions et les écarts et permet aux commissaires de piste et au staff de régler les problèmes. Cela supprime le gain ou la perte de temps aléatoires qui résulte des slows zones ou d'un safety car.

Stratégie de course : "Ne pas passer de temps au stand, rester sur la piste, ne rien toucher ou ne pas se faire toucher, s'arrêter uniquement pour le carburant, les pneus et l'huile occasionnellement, avec un changement de freins au petit matin. Pour les freins, il y a du changement cette année car nous aurons un système de changement rapide qui devrait permettre de changer les freins en même temps qu'un ravitaillement. Plus tard on le fait, mieux sont les freins le dimanche quand on peut avoir besoin d'attaquer. Les voitures sont si fiables maintenant et les temps au tour si proches, que deux secondes d'avantage (ou de désavantage) lors de chaque changement de pneus pourrait en fin de compte déterminer le vainqueur."

Le carburant : "l'économie de carburant est un problème mineur cette année au Mans, alors que ce n'a pas été le cas lors des années passées. L'ACO a examiné les données et a ajusté l'allocation de carburant pour toutes les GTE-Pro pour qu'elles puissent faire des relais de 14 tours, avec un bonus de trois litres. Il revient aux équipes de régler le débit de carburant ppur qu'un plein entier avec la voiture sur ses roues prenne 35 secondes. Le temps total du ravitaillement et le nombre de tours par relais n'est pas limité cette année. Un relais devrait faire un peu moins d'une heure."

Les pneumatiques : "En plus de l'allocation de 15 trains de pneus slicks pour la course, il n'y a pas de limite pour le nombre de trains de pneus pluie qui peuvent être utilisés pendant la course ; Nous devrons faire des doubles relais à presque chaque train de pneus. C'est un long circuit et alors qu'il commence à tomber des gouttes de pluie sur la ligne droite des stands, cela peut être sec ou il tombe des averses à l'autre bout du circuit. Le choix des pneus relève parfois davantage de la chance que du talent, mais nous avons ici davantage de choix de pneus qu'aux USA. Nous avons trois sortes de gommes pour le sec et deux pour les pneus pluie. Le choix pour une piste trempée ou humide n'est pas toujours évident. On compte fortement sur une bonne prévision météo et sur le jugement et l'expérience de nos pilotes."

Pitstop : "Les règles ont changé cette année : quatre mécaniciens et deux pistolets automatiques, le changement des roues et le ravitaillement peuvent de nouveau être effectués en même temps cette année. Le ravitaillement déterminera le temps total de l'arrêt.

On doit avoir des mécaniciens et des pilotes de talent ainsi qu'un peu de chance pour gagner au Mans. Nous l'avons fait avec la 333 SP en 1998, la F430 en 2008 et 2009 , et nous avons fini deuxièmes en GTE-Pro en 2016, et deuxièmes en GTE-Am l'année dernière. Nous aimerions penser que nous sommes dans la course pour la gagne cette année, mais avec la concurrence féroce en GTE, ce sera une course dure, très disputée ; Cela devrait se jouer probablement lors des deux ou trois derniers relais avec les voitures séparées par une poignée de secondes à l'arrivée."

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