Vécu

Faut-il encore croire au Père Noël en 2023 ?

Endurance Info
23 déc. 2023 • 16:15
par
Laurent Mercier

Cet article personnel qui parle de Noël débute par deux histoires bien tristes. Il y a un an jour pour jour, je déjeunais avec Pascal Saivet à qui on venait de diagnostiquer un cancer. A l’arrivée dans le restaurant, le serveur lâche : « Choisissez parmi les deux tables, celle-ci ou celle près du sapin. » Et Pascal de répondre du tac au tac : « Pour le sapin, on va attendre un peu. » Le serveur n’a rien compris, Pascal était hilare et moi gêné. On connaît la suite…

 

Deux ans plus tôt, à cette même période, c’est Claude Foubert qui nous quittait après des années de collaboration à Endurance-Info. Tout ça pour dire quoi ? Qu’il faut profiter du temps présent.

 

Pour ma part, je suis de la génération X, celle née en 1965 et 1976, celle du Baby Bust. Si vous êtes dans ce cas, vous avez sans aucun doute connu le discours de vos grands-parents à Noël avec le ‘moi de mon temps j’avais une orange et cela suffisait.’ Gamin, vous pensiez ‘donne-moi les cadeaux et laisse l’orange dans la corbeille à fruits.’ Au fil des ans et des décennies, tout a changé, bougé, tout est bouleversé. Gamin, je n’avais pas d’orange mais il y a eu des Playmobil, des petites voitures. Il fallait de toute façon qu’il y ait un rapport à la voiture. Un Noël, j’ai reçu l’encyclopédie des animaux en 10 volumes. Je ne pense pas avoir feuilleté la moindre page de ce cadeau embarrassant et inutile. Par contre, j’avais chaque année Le Livre d’Or de la Formule 1 écrit par Renaud de Laborderie. Sympa pour quelqu’un qui n’a jamais été passionné par la F1, mais au moins il y avait des voitures.

 

Il fut un temps où Internet n’existait pas, où il était difficile d’avoir des infos. En fin d’année, on attendait le VSD et son cahier détachable consacré au Paris-Dakar. J'avais une folle admiration pour les frères Marreau et leur Renault 20 Turbo 4x4 après l'aventure Renault 4. Début janvier, on écoutait à la radio le Rallye Monte Carlo, notamment 1981 avec la victoire du couple Ragnotti/Andrié sur une Renault 5 Turbo. Il était compliqué de tout suivre car les moyens de communication étaient loin de ce qu'ils sont maintenant. Pour la partie Endurance, il fallait lire les récits de Jean-Marc Teissedre où on appréciait autant ses écrits que les pilotes car c’était lui le boss de l’info Endurance. Il était celui qui voyageait à travers le monde pour nous faire vivre les courses. Gamin, croyez-moi, ça veut dire beaucoup. Vous vous mettiez à rêver d’être à sa place, ce qui plusieurs décennies plus tard est possible. Je peux vous dire qu’à cette époque, c’était totalement impensable de croire cela.

 

Depuis 2006, année de création d’Endurance-Info, le monde a changé, l’Endurance a changé. Endurance-Info fait partie, avec Dailysportscar, des vieux de la vieille de l’Endurance 2.0. Voir un site web débarquer dans le milieu de la presse papier encore dominatrice était plutôt mal vu car on nous prenait un peu pour des geeks boutonneux. Il a fallu du temps pour se faire une place. Nous avons enchaîné les Noëls année après année avec toujours de plus grandes ambitions pour la saison à venir. 

 

De nos jours, on a accès à tout en temps réel. Il y a encore une dizaine d’années, il fallait être sur Facebook. Maintenant, pour exister, il faut être sur X, Threads, Instagram, TikTok, Twitch, Snapchat, Discord et j’en passe, tout cela avec les travers que l’on connaît. Les influenceurs sont devenus bien plus bankables que les journalistes. Ce n’est pas une critique, juste une constatation d’un monde qui change. C’est un peu à l’image de l’Internet qui a détrôné petit à petit la presse papier. Les deux mondes sont différents car les journalistes font du contenu informatif, une information qui devient plus en plus contrôlée. Pour ma part, je dévisse de plus en plus de ce monde ultra connecté où pour faire son boulot il faut passer son temps sur les réseaux sociaux. Bientôt, pour être accrédité, on ne demandera plus combien le média fait de visites mais combien il a de followers.

 

Personnellement, j’aimerais réaliser des interviews à la So Foot. Quand un Pascal Olmeta raconte ‘Roger Milla, il était très fatigué… Très bon joueur, mais très caractériel. Il m’a cassé les couilles deux fois. Deux fois de trop'. On aime ou pas le discours, mais au moins ça parle, ça dit les choses. Il est vrai que le football a une force de frappe qui va bien au-delà de l’Endurance. La F1 a encore ce pouvoir des petites phrases avant d’être convoqué par la FIA pour s’expliquer. Croyez-nous, il n’est pas simple d’avoir de l’humain en Endurance. Les pilotes professionnels sont castrés par leurs employeurs et ces mêmes employeurs castrent les informations. Pour les discussions autour de la BoP, vous repasserez.

 

Si on devait vous raconter les jérémiades des uns et des autres pour des informations publiées, qui en plus étaient vraies, on y serait encore au réveillon. On a l’impression qu’on va changer la face du monde si on dit que untel va rouler chez untel avant le communiqué de presse officiel. Certains n’ont pas compris que plus on parlera d’eux, mieux ce sera. Maintenant, on a régulièrement les informations sous embargo pour une publication tel jour à telle heure. L’avantage est qu’il est possible de préparer l’article sans rush. Le côté négatif est que tout le monde publie la même info au même moment. La valeur ajoutée du média s’éloigne.

 

Sans nous jeter de fleurs, on peut vous assurer qu’on prend le plus souvent des pincettes avant de publier une exclu. Il arrive fréquemment que l’on prévienne les intéressés que l’on va publier. Pourquoi ? Juste par correction car rien ne nous y oblige. On pourrait se contenter de faire comme beaucoup, de dire que tout va bien dans le meilleur des mondes, que tout le monde il est beau tout le monde il est gentil. Désolé mais un média, ce n’est pas cela. Dans le passé, nous avons eu maille à partir : interdiction de parler à tel ou tel pilote, accréditations refusées, retrait de listes de diffusion. On ne fait QUE de l’Endurance, ne l’oublions pas.

 

Par chance, il reste encore de belles histoires à raconter. Voir Sarah Bovy décrocher la récompense de Pilote de l’Année devant des Vanthoor brothers, Neuville ou Martin, ça veut dire beaucoup pour quelqu’un qui il y a encore peu de temps entamait une formation de maître-chien car son avenir en course était dans l'impasse. Il vous reste très peu de temps pour faire votre liste au Père Noël. Il faut continuer de croire en ses rêves même si l'homme en rouge à la barbe blanche ne vous apporte pas ce dont vous rêviez. Dimanche soir, j'espère juste ne pas avoir le 11e volume de l'encyclopédie des animaux... 

Commentaires (16)

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dmeyers

23 déc. 2023 • 19:01

Quel plaisir cette lecture, MERCI 😊 Joyeuses fêtes.

vvf36

23 déc. 2023 • 20:03

Je vous souhaite bon courage pour continuer à informer avec une grande qualité les modestes suiveurs de l'Endurance que nous sommes.

Passez tous de bonnes fêtes à EI et à la communauté.

LittleBen

23 déc. 2023 • 20:12

Heureusement, nous, lecteurs d’Endurance-Info, nous savons que le Père Noël existe.
Il passe même tous les jours avec d’excellents articles ;-)
Joyeux Noël, Laurent.

gerardallan8

23 déc. 2023 • 21:16

Moi j'y crois toujours d'ailleurs les couleurs de Spark ne sont pas rouge et blanc pour rien croyez-moi 😉 Joyeux Noël à toute l'équipe d'Endurance Info et merci pour la belle saison que vous nous avez fait vivre 😇

Desmo

23 déc. 2023 • 22:46

Merci pour ce beau billet d’humeur.
Si il y a bien quelque chose les journalistes peuvent nous apporter en plus c’est bien cela. Ces notes d’humeur, de réflexion ou d’humour. Jusqu’a il y a peut j’achetais Moto et motards pour cela, pour leur première prise de paroles au debut du magazine, un moment qui nous prend et nous fait réfléchir. aujourd’hui ce magazine s’éteint, mais je suis heureux de savoir que je pourrais toujours en lire grace a vous Merci mr Mercier