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L’enfer… ou le paradis par Thomas Bastin !

Endurance Info
24H Nürburgring
3 juin. 2022 • 9:30
par
tbastin
Vivre des expériences. Se créer des souvenirs. Après tout, n’est-ce pas ça la vie ? En cette période où l’actualité peut mettre par terre certains des plus grands optimistes, j’avais envie de retrouver une certaine innocence. Celle du gamin passionné de sport automobile qui accompagnait son père et son parrain sur les circuits et les rallyes. Derrière les grillages, j’étais déjà commentateur avant l’heure (à leur grand dam souvent !) et je rêvais de devenir un acteur de ce « cirque » plein de couleurs, de sonorités et… d’adrénaline.

La vie m’a donné l’immense chance de faire ce que j’aime. Week-end après week-end, je suis sur une épreuve, le plus souvent pour commenter (à votre grand dam peut-être…) des courses avec une passion toujours bien présente, mais une innocence qui a probablement disparu. Même s’il y a du plaisir, il y aussi cette notion de travail, cette pression de « performer » dans ce que l’on fait.

Alors, quand ce dernier week-end de mai s’est avéré libre, l’idée de le passer au bord d’un circuit, derrière les grillages, est apparue. Pas seul toutefois ! Cette fois, c’était moi le père de famille pour un voyage aux 24 Heures du Nürburgring en camping-car avec nos trois fils et Coralie, mon adorable épouse, qui a appris à vivre avec notre passion dévorante (à son grand dam parfois…) pour le sport automobile. Quatre jours qui ont – si besoin en était – rallumé la flamme.

 

Tim, notre fils aîné de 10 ans, est passionné par la Nordschleife depuis qu’il a vu le film Rush. L’accident de Niki Lauda, le côté dangereux de ce circuit… ne me demandez pas pourquoi, mais ça le fascine. De mon côté, mon expérience de la Nordschleife est pratiquement nulle (un bref passage en spectateur en 2009). Finalement, je la connais mieux en virtuel, le simulateur ne pouvant toutefois donner qu’un tout petit aperçu de ce que c’est vraiment. La découverte de la réalité ne va pas me décevoir !

 

Dans un monde souvent trop aseptisé, le grand Nürburgring dénote. Ici, il n’y a presque pas le droit à l’erreur. L’herbe est là, juste derrière la ligne blanche. Ensuite, c’est le rail de sécurité. La piste est étroite. Les vitesses atteintes parfois indécentes au regard du tracé. Il ne faut pas être un grand spécialiste pour comprendre que le danger est plus élevé ici qu’ailleurs.

Après le départ vécu à hauteur de la petite bosse de Pflanzgarten, nous nous sommes arrêtés un peu avant les « S » Bellof, entre les deux carrousels. Un gauche en sommet avec des voitures dont l’avant se déleste, puis une cuvette abordée à une allure folle. En bord de piste, le souffle s’arrête parfois. La vitesse est hallucinante. Et que dire quand des GT3 sautent sur les freins ou mettent deux roues dans l’herbe pour éviter des voitures nettement moins rapides qui se font prendre un tour pour la énième fois ? Ici, il faut un gros cœur (pour ne pas dire autre chose…) !

 

Les décharges d’adrénaline se succèdent, comme quand j’étais gamin. Et le paradoxe ressurgit de plus belle : personne ne veut d’un accident grave, mais c’est pourtant de voir des pilotes affronter le danger avec une telle maestria qui est à l’origine de notre passion… Les pilotes eux-mêmes ne s’en cachent pas ! Ils savent qu’ils prennent dans l’Enfer Vert plus de risques qu’ailleurs. Mais c’est en jouant avec le danger qu’ils se sentent vivants.

 

Il y a beaucoup à retenir d’une visite aux 24 Heures du Nürburgring : la variété des voitures, l’enthousiasme des fans, les campings semi-sauvages ayant un côté surréaliste avec des installations improbables (rien que ça mériterait un article complet…), la météo changeante… Mais c’est avant tout le circuit qui a marqué mon esprit. Pour un fan de sport automobile, l’Enfert Vert a tout d’un paradis.

Les technologies actuelles permettent de mieux suivre la course que quand j’étais enfant. Le classement en direct sur le smartphone, les messages avec plein d’infos de ceux qui suivent le direct (merci Laurent et Sam !) et quelques liens vers des extraits vidéo. L’impressionnant accident de la Porsche « Grello » de Laurens Vanthoor ne nous laisse pas insensibles. Gilles, notre deuxième fils (8 ans), se met à pleurer. C’était sa voiture préférée ! Ce n’est pas beaucoup mieux pour Tim. Il avait fait de Maxime Martin son favori après l’avoir rencontré la veille, mais son Aston Martin est, elle aussi, sortie de la piste. Apparemment, ils ne pourront pas m’aider pour mes futurs pronostics (foireux, vous dirait Laurent Mercier)…

Une vraie bonne nuit de repos (avec en fond sonore le ronronnement de moteurs devenant une berceuse mécanique), puis retour sur le circuit dimanche matin. Nous avions pensé repartir avant l’arrivée, mais toute la famille est sous le charme. Voir de puissantes GT3 aborder la Nordschleife en slicks alors que les averses se multiplient est une expérience à vivre. Les pilotes sont sur des œufs et, désormais, nous savons mieux ce qui les attend pour les 20 prochains kilomètres… Pourtant, ils ne lâchent rien ! La lutte pour la victoire est captivante. Tim et Gilles sont consolés. Un certain Robin (c’est le prénom de notre troisième fils…) est en tête sur une Audi. Avec Dries Vanthoor, Fred Vervisch et Kelvin van der Linde sur l’Audi de l’équipe Phoenix, Robin Frijns s’imposera pour la première fois. Assis dans la tribune en face de la ligne d’arrivée, mes garçons crient et applaudissent ! Ils ont vécu un moment hors du temps et en garderont probablement des souvenirs pour la vie. Il parait que ça se transmet comme ça, la passion…

Pour moi, c’est un retour sur terre. Les prochaines échéances professionnelles sont là. Mais elles sont tout aussi excitantes, avec notamment une épreuve de 1000 Km pour le Fanatec GT World Challenge Europe sur le Circuit Paul Ricard et deux autres courses de 24 heures légendaires : Le Mans et Spa. Je suis convaincu qu’elles méritent aussi d’être vécues sur place ! Pour moi, ce sera différent. Cette fois, je serai derrière le micro plutôt que derrière les grillages.

Commentaires (9)

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Surgères

3 juin. 2022 • 9:43

A ce week-end au Paul Ricard !

Masu83

3 juin. 2022 • 10:43

Merci pour le partage Thomas

joskijos

3 juin. 2022 • 10:44

Chaque année on se dit qu'on va y aller et puis on n'y va pas ...Pourtant ce n'est pas très loin de chez nous ?

PitchCH

3 juin. 2022 • 11:09

Merci M. Bastin pour le partage! C'est.vrai que les structures des campeurs souvent impressionnantes, mêmes comparées aux américains à Sebring et Daytona. Et l'article serait mérité si la course n'était pas déjà aussi impressionnante! Par rapport à l'ambiance au Mans, ou à Spa, qu'est ce qui change?

ericbrouir@yahoo.fr

3 juin. 2022 • 11:51

Merci pour le partage M. Bastin. C'est comme cela que la passion de mon fils ainé a démarré mais c'était aux 24h de Spa, il y a 20 ans, il avait 4 ans. Maintenant, il est directeur sportif à l'Automobile Club du Luxembourg. Bonne continuation et ne changez rien à votre façon de travailler. C'est TOP.