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L'anecdote de l'été : une valise, une poignée de main à Bahrain et puis s'en va...

Endurance Info
4 aoû. 2019 • 21:19
par
lm@endurance-info.com

En 2019, on peut traverser la Manche en Flyboard mais n'est pas Franky Zapata qui veut. Pour aller à l'autre bout du monde, il faut encore prendre un avion, emmener une valise et par chance on ne doit pas ravitailler en vol. Il arrive tout de même parfois que la valise n'arrive pas à destination. On peut même être encadré de deux militaires armés pour essayer de la retrouver.

Nous sommes le 26 novembre 2013 sur un vol Paris/Doha/Bahrain pour assister à la finale du Championnat du Monde d'Endurance. C'est ma première visite dans le pays et quelle ne fut pas ma surprise à l'entrée dans l'aéroport de voir un panneau avec mon nom et un photographe me mitraillant comme si j'étais un pilote de classe mondiale alors que je ne suis même pas un pilote de classe régionale vu que je ne suis pas pilote du tout. Une photo dans le couloir d'arrivée, une autre avant de remplir la demande de visa. Je me dis que ça commence bien comme accueil. Une fois les formalités remplies et le tampon sur le passeport, direction le tapis pour récupérer le bagage. L'aéroport de Bahrain n'a rien à voir avec la démesure de ses voisins Dubai ou Abu Dhabi. Le tapis tourne encore mais pas de valise. Cinq minutes plus tard, il ne tourne plus. Tout est sorti ? Je regarde, je contrôle les bagages à côté du tapis. Rien, que dalle.

Je vais me renseigner au comptoir où le préposé me dit que le bagage va arriver. J'attends puis on me demande de sortir. Je sors sauf que une fois sorti, plus moyen de rentrer. Je vais à l'accueil expliquer mon cas. Et là deux militaires armés arrivent, me demandent mon passeport. J'explique à nouveau mon problème. Ils discutent entre eux et partent avec mon passeport. Ils reviennent quelques minutes plus tard en m'expliquant qu'ils vont m'emmener dans une pièce sans m'en dire plus. Donc, je me retrouve escorté de deux militaires armés dans l'aéroport de Bahrain alors qu'une partie du paddock arrivait dans l'autre sens. Evidemment il y avait des têtes connues qui me regardaient d'un air inquiet et là en peu de temps je suis passé de la star du jour photographiée au méchant qui ne veut que sa valise.

Plus de peur que de mal car la pièce en question était juste les objets trouvés. Bien entendu, aucune trace de ma valise. Je prends un taxi à qui j'explique mon cas car je suis quasiment à poil. Il me dit qu'il connaît un centre commercial. J'avais eu le temps de regarder sur Internet et j'avais vu un mall avec tout ce qu'il fallait pour s'habiller. Lui me dit : no, no, cheaper, cheaper. OK, je lui fais confiance et me voilà parti faire le Pretty Man dans Bahrain. Le centre commercial n'étant pas ouvert, Saad, mon chauffeur, et moi allons boire une café. On échange sur le Pakistan, son pays d'origine, sa famille et son travail de taxi à Bahrain. Les magasins ouvrent mais là stupeur. Je ne demande pas à faire un défilé chez Hollister mais c'est juste pas possible. Il n'y a rien à ma taille, la plus petite taille devant être XL. Et alors que dire des vêtements... De quoi faire pâlir Christian Bodin, le fils de Maria. Une photo de profil sur Tinder fagoté ainsi ne permettrait pas d'avoir le moindre match.

Changement de programme et direction Bahrain Mall pour faire quelques emplettes en compagnie de Saad, mon chauffeur compréhensif. Là, je trouve chaussure à mon pied, sans oublier les affaires de toilette. Il est temps d'aller au circuit. Croyez-le ou non mais Saad m'a fait payer uniquement la course aéroport/circuit alors que nous avons passé plus de deux heures ensemble et qu'il a été d'un précieux secours. Imaginez la même scène en France. Saad méritait bien un bon pourboire. En prenant congé, il me donne son numéro de téléphone et il m'est depuis de faire appel à ses services. En sortant de la voiture, je me rends compte que je n'ai pas de sac, juste les poches des magasins. Vous voyez la scène ? Je marche dans le paddock avec mes poches en croisant les mêmes personnes qui m'avaient vu quelques heures plus tôt encadrés de deux militaires. Je remercie une nouvelle fois l'ami Jérôme Fougeray pour le prêt d'un sac de voyage.

Le meeting se passe et en revenant à l'aéroport, je retourne demander si mon bagage n'a pas été retrouvé, ce qui évidemment n'était pas le cas. L'histoire aurait pu s'arrêter là mais un mois et demi plus tard, je vais à Dubai pour les 24 Heures. J'apprends que plusieurs équipes LMP2 sont en essais à Bahrain pour préparer la saison. Je me dis que ça peut être intéressant d'aller y faire un tour surtout que je suis une semaine à Dubai. Je réserve un vol pour Bahrain, cette fois sans bagage vu que c'est pour la journée (7 janvier 2014). Pas folle la guêpe. Je décide de me passer des services de Saad pour cette fois et je loue une voiture. Je décide quand même de repasser par les objets trouvés avec mon ticket de bagage perdu juste pour avoir bonne conscience. On me dit que mon bagage est peut-être là. J'attends, j'attends, j'attends encore. Ma valise était pleine de vêtements car j'arrivais d'un autre déplacement et il y avait un petit appareil-photo à l'intérieur. Une bonne heure plus tard, on vient finalement me dire que mon bagage n'a pas été retrouvé.

Je prends la voiture de location équipée d'une bonne vieille carte routière (sans GPS car en 2013, les loueurs n'avaient pas de GPS de Bahrain à disposition). Pas très grave car ma mémoire visuelle sur les lieux est assez bonne. Ceux qui connaissent Bahrain savent qu'il assez facile de se rendre au circuit depuis l'aéroport (environ 40 minutes selon le trafic). La température était très lourde (comme souvent à Bahrain). Je sors du parking, j'emprunte la route qui contourne Manama et là d'immenses flaques d'eau qui font penser à un étang. On ne voit même plus les trottoirs. Un état des routes à faire pâlir un directeur de course. Vu le peu de fois où il pleut dans le pays, les évacuations sont quasi nulles. J'arrive à un feu et toutes les routes barrées. Tout le monde est obligé de faire demi-tour, d'emprunter d'autres routes sans signalisation pour aller au circuit et le plan donné par le loueur faisait plus penser à un dessin d'un gamin de 4 ans. Je mets le GPS de mon téléphone mais en 2013, mon forfait était faible pour l'international. Cinq secondes plus tard, 'votre forfait est épuisé'. Vu que je suis malin, je me dis que je vais trouver un McDo, prendre la connexion wifi pour Google Maps et m'en tenir à la route donnée sans m'en écarter. Sauf que impossible de trouver un McDo, toutes les routes sont inondées. J'essaie d'appeler Saad à la rescousse, en vain. Je tourne dans Manama, je tombe quasiment en panne d'essence car là-bas on ne vous loue pas forcément une auto avec le plein d'essence. Je suis complètement paumé dans Manama, j'essaie de me souvenir. Je me souviens être passé devant un dépôt pétrolier en novembre qui ressemblait étrangement à celui sur ma gauche. Je fais confiance à mon sens de l'orientation, je continue sur la route et j'arrive enfin au circuit près de 3h plus tard vu l'état des routes. J'entends le bruit des moteurs car tout a séché (sauf les routes). Je rentre sur le circuit, je regarde ma montre et il est temps de rentrer pour le vol retour vers Dubai. Je sers la main d'Oliver Turvey, Fabien Giroix et quelques autres pilotes présents sur place, je prends quelques photos et je remonte dans ma voiture vers l'aéroport. Pas un article, pas une interview et pas de bagage...

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