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Quel avenir pour le FIA WEC ?

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Endurance Info
10 déc. 2017 • 15:30
par
lm@endurance-info.com
En quittant le Nürburgring au beau milieu de l’été, on s’est dit que les feux du FIA WEC étaient au rouge. En repartant de Mexico, les feux étaient repassés à l’orange et à l’issue de la saison, le vert repointe le bout de son nez. Tout n’est pas gagné mais on s’achemine vers une ‘Super Saison’ 2018/2019 intéressante et tant pis pour les constructeurs absents.C’est bien connu que les absents ont toujours tort et on s’amusera sans eux. Si l’herbe est plus verte ailleurs, qu’ils ne se gênent pas. Ce n’est pas faire injure au FIA WEC de dire que le championnat est à un tournant de sa courte histoire. Par chance, le Championnat du Monde d’Endurance de la FIA peut s’appuyer sur les 24 Heures du Mans. On n’arrête pas une course de 1923 d’un claquement de doigt.Lancé en 2012, le FIA WEC n’a pas mis longtemps à se faire une place malgré le départ précipité de Peugeot avant même le coup d’envoi et le projet Nissan qui n’aura été qu’un feu de paille marketing. On a très vite parlé du championnat comme d’une alternative à la Formule 1. Souvenons-nous que Ferrari a fait officiellement du lobbying en exprimant clairement son intérêt pour le LMP1 en remplacement de la F1. Le lobbying n’engage à rien, sauf à mettre le doute aux organisateurs. Ferrari est toujours en F1 et le WEC a perdu coup sur coup Nissan, Audi et Porsche.On ne peut pas dire que le WEC soit responsable des départs des trois constructeurs cités précédemment. Nissan est parti à cause d’une voiture à la technique trop éloignée des contraintes du championnat, Audi a dû faire face au ‘dieselgate’ et Porsche s’est dit que le green était plus intéressant. En revanche, on peut reprocher au championnat de ne pas avoir su contrôler l’escalade des coûts. Porsche part dans l’indifférence la plus totale, là où un an plus tôt Audi est parti sous les applaudissements de tout un paddock. Porsche a mis la barre tellement haute que personne n’a pu suivre et le constructeur explique en partie son départ à cause d’un manque de concurrence.Toyota sauve le championnat pour la deuxième fois et il serait bien qu’on s’en souvienne. Les médisants vous diront que le manque de concurrence est la meilleure solution pour remporter enfin les 24 Heures du Mans. N’oublions pas que rien n’est jamais écrit à l’avance. On peut perdre Le Mans en étant seul, pas uniquement par manque de compétitivité, mais parce qu’une course d’endurance est ponctuée d’aléas bien imprévisibles. Si c’était si facile de l’emporter, 250 000 personnes ne se déplaceraient pas chaque année dans la Sarthe.Un nouveau calendrier qui s'appréhende différemment...Les concurrents du FIA WEC vont devoir s’habituer à un nouveau modèle qui court sur deux années calendaires. La ‘Super Saison’ s’appréhende différemment et il faut laisser un peu de temps au temps pour que les choses rentrent dans l’ordre. Il est facile de critiquer tant que le modèle n’a pas été testé. Rappelons-nous le passage de 39h à 35h dans les entreprises. On nous expliquait que ça ne marcherait jamais. Certes, il n’y a pas que des avantages mais rester les bras croisés à attendre n’est certainement pas la meilleure solution. Il fallait une réaction et l’ACO/WEC a réagi en quelques semaines dans une période où tout le monde aurait préféré prendre du bon temps sur une plage ensoleillée. Il est faux de dire que le WEC n’intéresse pas. Il faut juste maintenant faire qu’il devienne attractif pour de nouveaux entrants dans une période où le marketing ne jure que par la Formula E.Il est loin le temps où un capitaine d’industrie de la trempe de Jean-Luc Lagardère mettait toutes ses forces dans la bataille pour faire vibrer des millions de français. Chaque service compétition doit défendre son programme devant un Board qui n’a que faire du sportif et qui pense plus à la calculatrice qu’au sport. On peut le regretter mais il faut vivre avec son temps. Les temps changent et il n’est pas certain que le cap choisi soit le bon pour les passionnés d’endurance.Une grille alléchante en 2018/2019...Les décisions prises vont dans le bon sens. Il faut s’attendre à voir une grille 2018/2019 au moins aussi garnie que cette année. Un premier état des lieux (non exhaustif) donne :LMP1 : Toyota (x2), SMP Racing (x2), Manor TRS Racing, DragonSpeed, Rebellion Racing (x2), ByKolles RacingLMP2 : Jackie Chan DC Racing x Jota Sport (x2), Signatech-Alpine, TDS Racing, G-Drive Racing, Manor (?)GTE-Pro : AF Corse, Porsche GT Team, BMW Team MTEK, Ford Chip Ganassi, Aston Martin RacingGTE-Am : Spirit of Race (x2 ?), Clearwater Racing, Proton Competition (x2 ?), Gulf Racing, Project1 Motorsport, TF SportD’autres équipes sont en pleine réflexion pour une arrivée dans le grand bain mondial même s’il faut pour cela réunir un budget conséquent. Certaines ont compris la possibilité de gagner Le Mans avant l’arrivée de la nouvelle réglementation. On se doit de faire confiance au législateur pour apporter de la sérénité, une visibilité sur le long terme et surtout un contrôle des coûts dans un championnat qui repose en partie sur des fonds privés. Il faut faire des économies car il est utopique de penser que les budgets vont diminuer d’eux-mêmes. Le plateau 2018 devrait être garni de 12 voitures engagées directement par un constructeur (10 en GTE), soit même pas la moitié du plateau. Il faut donc tout faire pour que les privés puissent s’en sortir.Ce n’est pas la plus grosse partie du budget mais à une époque où il n’est pas facile de boucler les fins de mois, est-il normal de pénaliser financièrement un team qui modifie son équipage peu de temps avant le meeting ? Toutes les équipes aimeraient conserver leurs pilotes toute la saison mais les impondérables financiers font que ce n’est pas toujours possible. En modifiant leurs équipages, les teams se pénalisent eux-mêmes.Vers le retour du GTP ?Le législateur a conscience qu’il ne faut pas rater l’avenir. On attend encore les finalités de la nouvelle réglementation mais si l’option prise est celle d’un groupe GTP (Grand Tourisme Prototype), il y a fort à parier que tout le monde rameute tête baissée. Dans quelques années, on pourrait avoir en lice pour la victoire : Audi, Porsche, Ferrari, BMW, Lamborghini, McLaren, Mercedes, Nissan, Aston Martin, Ford et d’autres. Prendre une GTE pour lui donner un look de prototype intéressera forcément si les marques peuvent proposer un produit moins onéreux qu’une LMP1 hybride même si toutes les marques premium se mettent aux nouvelles technologies. Pour cela, il faut aussi voir de quelle façon gérer ces nouvelles technologies : hybride, électrique, pile à combustible, hydrogène. On fait partie de ceux qui ont milité très tôt pour du GTP. Il faut faire rêver les gens. Désolé, mais une 919 Hybrid ou une TS050 HYBRID ne met pas les fans en transe. Vous tournez plus la tête sur une Porsche 911 GT1 ou une 919 Hybrid ?  Que dire de la GT-One face à la TS050 HYBRID ?L’Endurance intéresse toujours. On ne trahira pas de secret pour dire que McLaren a pensé à venir dès la saison prochaine en LMP1 non hybride en s’appuyant sur un constructeur de châssis LMP2, que Lamborghini lorgne du côté du GTE et que Porsche n’a pas dit son dernier mot pour fournir un moteur LMP1 privé.Les GTE à la fête mais pas pour la victoire au général...En 2018/2019, les constructeurs seront présents en GT mais ils ne gagneront pas au général. L’avenir passe certainement par les GT, qu’elles soient bodybuildées ou pas. La Balance de Performance automatique fait nettement moins débat que par le passé et c’est tant mieux. Est-ce qu’à l’avenir une auto typée GTP pourra rivaliser face à un vrai prototype. Faudra-t-il mettre des nouvelles technologies dans les nouveaux prototypes s’ils font penser à des GT ? Le Mans et le FIA WEC peuvent-ils vivre sans laboratoire technologique ? Que faire des LMP2 ? Si on laisse les protos tels qu’ils sont aujourd’hui, il faudra alors survitaminer ceux de la catégorie reine. Le mot d’ordre est clair : contrôle des coûts. Sans cela, rien ne fonctionnera. Quand on voit ce que coûte un développement moteur sur une GTE, il y a de quoi partir en courant, surtout pour être régi par une BOP.La FIA et l’ACO veulent une belle compétition entre les usines et les privés en LMP1 et on ne peut pas leur donner tort. Le groupe de travail planche forcément sur un produit qui doit permettre de réduire les budgets et garder l’innovation technologique au centre de la réglementation. En attendant, les LMP1 non hybrides vont tenter de se faire une place au soleil avec des autos éligibles sur les trois prochaines saisons, plus une en compagnie des autos de la prochaine génération. On l’a dit et redit, il faut séduire. Le staff technique FIA est en plein remaniement avec de nouvelles têtes qui vont s’occuper de donner un souffle nouveau au championnat. Il est aussi facile de donner des leçons, de dire qu’il fallait faire comme ceci ou comme cela. En mars 2012, tout le monde était tout feu tout flamme à Sebring pour le coup d’envoi d’un championnat qui est vite devenu une alternative à la Formule1. Lors de la conférence de presse donnée en présence de Jean Todt, président de la FIA, on lui parlait déjà de comment distribuer des primes alors que le premier départ n'avait pas encore été donné. Le vainqueur des 24 Heures du Mans ne gagne même pas de quoi rembourser son prix d’engagement et aucune prime ne sera jamais à la hauteur de l’investissement consenti. On ne fait pas du sport automobile pour gagner de l’argent, on en fait déjà pour ne pas en perdre et communiquer autour. Pour gagner de l'argent, il y a la compétition-client qui ne s'est jamais portée aussi bien.Si on devait dresser une feuille de route, elle ne serait on ne peut plus simple sur le papier : contrôler les coûts, prendre soin des équipes privées, faire dans la stabilité, écouter les acteurs. La mise en pratique n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît et on peut vous certifier qu’être organisateur n’est pas une mince affaire. Il faut choisir les bons circuits, prendre les bonnes décisions réglementaires et ne pas céder systématiquement au lobbying des uns et des autres. Vous l'aurez compris, le FIA WEC est à la croisée des chemins mais tout le monde attend déjà avec impatience le Prologue du printemps prochain... 

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